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REVUE LITTÉRAIRE DE L’ALLEMAGNE.

un mérite ordinaire chez les Allemands. Ce livre ne saurait être regardé cependant comme un tableau complet des connaissances géographiques, de leur développement progressif et de leurs ramifications, il est pour cela trop restreint et trop peu détaillé ; mais, à le prendre comme manuel élémentaire, il est excellent. Nous souhaiterions qu’il fût traduit en français et introduit dans nos écoles ; avec notre innombrable quantité de prétendus traités de géographie, nous n’avons encore rien de semblable à ce simple et intéressant livre de M. Lœwenberg.


Geschichte von Rügen und Pommern (Histoire de Rügen et de la Poméranie), par M. A.-W. Barthold. — L’île de Rügen, située au bord de la mer Baltique, est une petite terre de trente-six lieues carrées d’étendue, qui ne renferme guère plus de trente mille habitans. Elle n’a par conséquent aucune importance politique. C’est tout simplement un district d’une des provinces septentrionales de la Prusse. Mais les voyageurs vantent ses sites pittoresques, l’aspect de ses longues baies creusées par les flots de la mer, la vue de ses montagnes de roc habitées jadis par les divinités du paganisme. Les romanciers aiment à étudier ses mœurs, les antiquaires ses souvenirs, car cette petite île a eu une histoire, une mythologie et des monumens à part. Tour à tour envahie par les Celtes, par les Germains, par les Slaves, elle a conservé la tradition de ces trois différentes races. Dévouée à son paganisme, elle en a gardé le culte plus long-temps qu’aucune autre contrée de l’Europe. Gouvernée par ses propres princes, elle a passé de cet état d’indépendance à l’asservissement. Elle a été réunie à la Suède, puis au Danemark, puis encore à la Suède. Si petite qu’elle soit, son nom se trouve fréquemment cité dans les sagas islandaises et dans les annales historiques des royaumes scandinaves.

Près de là est l’ancien duché de Poméranie, aujourd’hui province de Prusse, qui a passé par les mêmes invasions et a conservé long-temps la même idolâtrie. L’histoire de cette province et de l’île de Rügen est pour tous ceux qui s’intéressent aux traditions anciennes de l’Allemagne un important sujet d’étude. Jusqu’à présent on n’avait sur cette matière que des chroniques d’une ville ou d’une époque, et des essais inachevés. Un professeur de l’université de Greifswald a entrepris de recueillir toutes ces chroniques, tous ces documens épars, et d’en former une histoire complète. Le premier volume de son ouvrage annonce un esprit patient et érudit. Pour accomplir son œuvre de science et de patriotisme, l’auteur s’est livré, on le voit, à des recherches nombreuses et difficiles ; mais le plan qu’il a adopté ôte à la lecture de son livre l’attrait facile qu’elle devrait avoir. Au lieu de narrer, il discute. Il compulse les textes anciens et modernes et les dissèque l’un après l’autre ; puis il se jette dans des digressions intéressantes, mais éloignées de son sujet. Le récit des évènemens disparaît au milieu de tout ce luxe de dissertations ; on le cherche et on ne le retrouve que de distance en distance, après une question d’anthropologie ou un commentaire philologique. Nous n’essaierons pas de suivre