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REVUE DES DEUX MONDES.

— Ce que tu vas devenir, Louison ? c’est tout simple. N’ayant pu fléchir le docteur Herbeau, je suis allé chez le docteur Savenay…

Louise tressaillit à ce nom.

— Mais, mon ami, s’écria-t-elle, je vous ai dit que je ne pouvais, que je ne devais pas…

— Allons-nous recommencer ? interrompit M. Riquemont avec colère. Comment, ventrebleu ! je me donne un mal d’enfer pour vous trouver un médecin ; je crève des chevaux, j’use le pavé de Saint-Léonard ; je vais de l’un à l’autre, du docteur Herbeau au docteur Savenay ; je néglige mes poulains, et vous n’êtes pas contente ! Vous attendez peut-être que M. Chomel ou M. Gendrin vienne de Paris s’établir à Riquemont tout exprès pour soigner vos gastrites ? À votre aise ! Vivez, mourez, cela vous regarde ; pour moi, je ne m’en mêle plus.

Il sortit. Demeurée seule, Louise s’agenouilla au pied de son lit. La pauvre enfant ne comprenait qu’une chose à la comédie qui venait de se jouer autour d’elle, c’est qu’elle restait sans appui, sans défense, et qu’en perdant le docteur Herbeau elle perdait son dernier refuge. Elle joignit ses mains, et les yeux pleins de larmes, et d’une voix suppliante :

— Mon Dieu, secourez-moi ! dit-elle.


Jules Sandeau.
(La fin au prochain no.)