Le souvenir de cette campagne est aussi vivant et aussi populaire en Espagne que celui de tous les autres épisodes de la grande croisade contre les Maures. Bien des traditions épiques et romanesques s’y rattachent. Calderon a mis en scène une de ces traditions dans sa comédie intitulée : Aimer après la mort, ou le Siége de l’Alpuxarra (Amar despues de la muerte, o el Sitio de la Alpuxarra). Au commencement de la seconde journée, le théâtre représente le camp de don Juan d’Autriche au pied des montagnes ; un nommé don Juan de Mendoza, car ce nom de Mendoza vient toujours au souvenir des Espagnols quand il est question de guerre contre les Maures, fait au jeune prince une longue et magnifique description de l’Alpuxarra et des belliqueuses populations qui l’habitent. Puis l’armée chrétienne défile sur le théâtre, et ici vient une espèce de dénombrement à la manière d’Homère :
Quel est ce premier corps de troupes ?
Prince, c’est la milice de Grenade et de tous les pays arrosés par le Xenil.
Qui les commande ?
Le marquis de Mondejar, comte de Tendilla, gouverneur (alcayde) perpétuel de l’Alhambra.
À ce nom, le Maure en Afrique tremble. Et qui sont ceux-ci ?
Ceux de Murcie.
Quel est leur chef ?
Le grand marquis de los Veles.
Que ses hauts faits portent au loin sa renommée !
Ceux-ci sont ceux de Baeza ; leur chef est un soldat qui mérite qu’on lui élève des statues pour éterniser sa mémoire : don Sanche d’Avila, seigneur.
Pour tant qu’elle fasse, la renommée fera peu pour lui, si elle ne dit qu’il est élève du duc d’Albe, et qu’il a appris à cette école à vaincre et à n’être pas vaincu.
Cette troupe qui s’approche est la vieille brigade (tercio) de Flandres, qui
