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de représentations héroïques par un motif plus heureux, plus propre à fournir ces oppositions de formes, de costumes, de caractères et d’expressions qui répandent l’intérêt et la vie sur les œuvres de l’art. C’est le roi de Bavière qui avait déterminé lui-même le sujet général de cette immense composition, et c’est un seul artiste, Martin de Wagner, qui avait été chargé de son exécution. Aussi retrouve-t-on dans ce bas-relief de deux cent vingt-quatre pieds de long, auquel tant de mains différentes ont dû travailler, une unité de caractère et un accord de style qui satisfont à la fois l’œil et l’intelligence. Ce travail, si important par le nombre, le relief et la proportion des figures, fait le plus grand honneur à son auteur ; et par la manière dont il est exécuté, il mérite de servir d’exemple partout où l’on a le sentiment vrai des besoins de l’art joint à un libre emploi des ressources de la puissance publique. Un autre grand ouvrage, qui mériterait aussi une description particulière, mais que je dois me borner à signaler à l’estime publique, ce sont les groupes de statues qui remplissent les deux frontons. Ces figures, au nombre de quinze dans chaque fronton, et entièrement détachées du tympan, sont toutes de la main de L. Schwanthaler. Le groupe de la façade principale, qui est celle du midi, montre l’Allemagne personnifiée, assise au milieu du fronton et recevant, de guerriers en costume héroïque, les diverses provinces rattachées à l’empire par suite des évènemens de 1813 et 1814. Le groupe de la façade postérieure représente Arminius vainqueur des Romains, et dominant de sa haute stature les chefs chérusques qui l’entourent et les guerriers romains qui succombent. Ces deux grandes compositions, la dernière surtout, pleine de verve et de caractère, honorent au plus haut degré le talent de l’artiste, bien qu’on pût y désirer plus d’étude de la nature dans le nu et dans la draperie, à l’exemple de ces statues des frontons d’Égine qu’on a sous les yeux à Munich, et qu’il est moins permis à Munich qu’ailleurs de ne pas fidèlement imiter.

Je n’ai plus à rendre compte que des noms et des portraits des grands hommes qui forment le principal élément moral de la décoration de la Walhalla et l’objet même de la consécration de cet édifice. Ici encore, nous rencontrons une pensée royale qui s’est montrée absolue dans ses décisions autant que souveraine dans l’expression qu’elle leur a donnée, et qui mérite à ce titre notre premier hommage ; car nous sommes de ceux qui pensent qu’une intelligence supérieure et une volonté suprême doivent présider à toute œuvre d’art qui répond à un besoin public et à un sentiment national, et