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REVUE. — CHRONIQUE.

hommes. Dans notre opinion, le mode proposé par M. Duvergier de Hauranne tournerait en définitive à l’avantage du parti gouvernemental. Malgré cela, nous espérons peu de le voir adopter d’emblée. Sachons du moins gré à la chambre d’avoir permis la lecture de la proposition à la presque unanimité.

Le ministère doit maintenant, si l’existence lui est chère, s’occuper très sérieusement des affaires du pays. Qu’il ne laisse pas dire qu’il n’est puissant qu’en paroles, et que, si M. Guizot avait une extinction de voix, on se demanderait : Où est donc le cabinet ? Soyons justes : si d’importantes discussions n’occupent pas encore la chambre, on ne peut guère l’imputer au ministère. Des projets graves et nombreux ont été présentés. Les commissions travaillent, mais sans enfanter. On dit que la commission de la loi des sucres désespère d’elle-même. L’affreuse catastrophe de la Guadeloupe est encore venue troubler profondément les esprits. Quel horrible malheur ! Et Dieu veuille que nous ayons tout appris et que de nouvelles secousses n’aient pas ajouté à d’épouvantables calamités des calamités nouvelles ! Il ne peut y avoir qu’un sentiment et qu’une pensée dans ce moment : secourir d’une manière prompte et efficace nos compatriotes des Antilles. Le ministère a fait une demande. Elle est insuffisante. C’est à la chambre de seconder la juste sollicitude du gouvernement en lui proposant à son tour d’augmenter le chiffre de la subvention.

M. le ministre de l’instruction publique n’a pas encore présenté le projet de loi sur l’instruction secondaire. Il a fait mieux ; il a présenté au roi et publié ensuite un rapport qui est un document complet, capital, où se trouvent recueillis, classés, rapidement expliqués, tous les faits, tous les renseignemens qui représentent « dans son ensemble, dans ses améliorations successives, dans son esprit et dans ses résultats, la grande institution scientifique et sociale qu’avait fondée l’empire, que la restauration a maintenue, malgré des intervalles de défaveur et de défiance, et qui, sous le régime actuel, a reçu du vote réitéré des chambres et de la confiance publique une extension et une activité nouvelle. »

Il fallait préparer les esprits à l’examen législatif que l’instruction secondaire doit encore provoquer. Et quelle préparation plus sincère et plus efficace qu’une exposition complète et détaillée de tous ces faits et de tous ces résultats dont on parle tant aujourd’hui, et qui sont encore peu connus ?

L’instruction secondaire n’attirera jamais assez l’attention du public ; elle est le fondement de la haute civilisation du pays. C’est par elle qu’on marche au premier rang parmi les nations policées. Si l’instruction élémentaire est destinée à former une nation intelligente et morale, c’est l’instruction secondaire qui forme les grandes et nobles nations, les peuples qui ne meurent jamais. Quelles que soient les vicissitudes de la politique, ils vivent dans l’histoire par l’éclat de leur nom et les créations de leur génie. C’est au sein de l’instruction secondaire que se prépare cette aristocratie mobile et toujours ouverte qui est à la fois le ciment, la force et l’ornement des pays d’égalité. Laissons parler M. Villemain :