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juger ! Pourquoi ne pas faire l’essai de ces chaires d’application dans nos facultés ? Si l’on ne peut en donner aux industries diverses, trop multipliées, et pratiquées chacune par un trop petit nombre d’individus, on ne peut les refuser à l’art agricole, qui intéresse le pays tout entier. Or, qu’avons-nous fait encore ? Croit-on que les cours du conservatoire des arts et métiers atteignent le but que nous indiquons ? Sans doute, les professeurs ne peuvent être mieux choisis ni plus habiles ; mais, relégués loin du quartier des études, ils n’attirent pas le genre d’élèves que je voudrais voir à leur cours, ces nombreux étudians en droit et en médecine, dont si peu seront avocats et médecins occupés, mais qui tous retourneront au sein de leurs propriétés rurales, qu’ils n’apprennent pas à cultiver avec le Code civil ou le Manuel d’anatomie. Nous nous plaignons que notre jeunesse déserte de toutes parts les champs pour les professions libérales : sachons lui apprendre tout ce qu’il y a de noble, de relevé, de curieux, d’attachant dans la carrière qu’elle dédaigne ; rappelons-lui qu’à côté du labeur manuel il y a aussi le travail intellectuel ; rattachons-la à la terre par les mobiles qui agissent le plus sur les jeunes esprits.

Si, après avoir parcouru les questions qui touchent au capital et aux hommes qui pratiquent l’agriculture, nous abordons la question du sol, la carrière devient plus vaste encore. En effet, il s’agit ici des moyens de prévenir l’épuisement de la terre et de le réparer, c’est-à-dire de favoriser les produits qui retirent de l’atmosphère plus qu’ils ne prennent au sol et qui lui rendent des débris riches en principes fertilisans, en un mot les cultures destinées à la production et à l’entretien des animaux. C’est dans un travail spécial seulement que l’on pourrait traiter ces vastes questions auxquelles se rattachent celles des douanes et des protections, celles de la multiplication et du perfectionnement des races ; mais je ne puis omettre d’indiquer ici la plus grave, la plus importante des améliorations que notre sol peut recevoir. L’est, le sud et le centre de la France sont sous l’influence d’un climat excessif où la mauvaise répartition des pluies oppose de grands obstacles à une bonne agriculture. En effet, comment faire des élèves de bestiaux, si les années de disette de fourrage succèdent inopinément et fréquemment à celles d’abondance ? Comment avoir des fermiers, si l’inconstance des récoltes ne permet pas de compter sur un produit à peu près certain, s’il faut avoir en avance plusieurs années de fermage pour parer à ces fréquens accidens, si, en un mot, au lieu de produits