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avec Guy Patin, il s’adonna à l’étude de la médecine, d’abord sous M. Moreau. C’était en 1622. Sa réputation de capacité et de science s’étendait déjà hors des écoles. Il avait publié un petit livre, le Marfore ou discours contre les libelles, dont je ne parlerai pas, attendu que je ne sais personne qui l’ait lu ni vu. Le président de Mesmes de cette famille de Mécènes qui avait nourri Passerat et qui devait adopter Voiture, le prit pour son bibliothécaire. Il paraît que Naudé quitta cette place un peu assujettissante pour aller étudier à Padoue, en 1626 ; il en fut rappelé par la mort de son père. En 1628, la Faculté de médecine le choisit pour faire le discours latin d’apparat, proprement dit le paranymphe, qui était d’usage à la réception des licenciés ; c’était une grande solennité scholaire. Avant de leur décerner le bonnet doctoral ou, comme on disait, le laurier, et de les lancer dans le monde, la Faculté, en bonne mère, les faisait louer et préconiser en public. Ils étaient neuf cette fois, parmi lesquels des noms plus tard célèbres, Brayer, Guenaut, Rainssant. Naudé s’acquitta de son office avec splendeur ; il prit comme corps de sujet, indépendamment des neuf petits panégyriques, l’antiquité de l’École de médecine de Paris. On fut si content de sa harangue en beau latin fleuri, plus que cicéronien, et panaché de vers latins en guise de péroraison, qu’on l’admit tout d’une voix à compter lui-même parmi les candidats à la licence, de laquelle il s’était trouvé exclu par son voyage d’Italie. Peu après, Pierre Du Puy, qui l’estimait fort, parla de lui au cardinal de Bagni, ancien nonce en France, qui avait besoin d’un bibliothécaire et secrétaire. Naudé s’attacha à ce cardinal, et le suivit en Italie à la fin de 1630 ou au commencement de 1631 ; il y resta onze années pleines, n’étant revenu à Paris qu’en mars 1642, pour y être bibliothécaire de Richelieu, puis de Mazarin. Les cardinaux et les bibliothèques, ce furent là, comme on voit, le constant abri et comme le gîte de Naudé.

Ces onze ou douze années d’Italie et de Rome durent avoir grande influence sur lui et sur ses habitudes d’esprit ; mais on peut dire qu’il y était bien préparé par la nature. Il suffira pour cela de parcourir quelques-uns des écrits qu’il publia antérieurement. Avant de les lire et de les citer, une remarque pourtant, une précaution est nécessaire. Pour Naudé qui débute vers 1623, et qui s’en va passer hors de France de longues années, Malherbe ni Balzac ne sont guère jamais venus. Il écrit en français, sauf l’esprit et le sens, comme le Père Garassus ou comme le Père Petau, quand ce dernier s’en mêle. Naudé y ajoutait des traits de plume à la Mlle Gournay,