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DU MOUVEMEMENT CATHOLIQUE.

moyen-âge. Ainsi, en ce moment, on bâtit à Rouen, sur la colline du Bon secours, une chapelle à la Vierge, et, comme aux âges les plus mystiques, les ouvriers donnent des journées gratuites tandis que M. l’archevêque et M. le premier président donnent des vitraux, à la seule condition de voir sculptées leurs armoiries sur les fenêtres.

Du reste, il est juste de le dire, le sentiment religieux du XIXe siècle, au milieu de ses entraînemens parfois mondains et purement admiratifs ou littéraires, a eu aussi son côté pratique ; il ne s’est point contenté de cette dévotion égoïste et stérile qui ne veut que son propre salut. Effrayée des misères inévitables que la civilisation traîne à sa suite, effrayée de la dureté de la charité légale et de l’impuissance trop souvent démontrée de la philanthropie, la foi contemporaine s’est imposé l’exercice des œuvres bienfaisantes commandées par l’Évangile. Tandis que les réformateurs matérialistes s’adressaient au peuple en lui montrant la terre promise dans l’application de leurs utopies, la piété sincère, moins orgueilleuse et plus puissante que le bien, s’adressait aux pauvres et leur tendait la main. Les plus tièdes eux-mêmes applaudiront sincèrement à la propagation des œuvres de bienfaisance, et leur pardonneront de grand cœur ce qu’elles ont parfois d’un peu mondain. Il faut donc citer dans Paris, comme ayant droit à la reconnaissance publique, la société de Charité maternelle, l’association de Sainte-Anne, celle des Mères de famille, fondée par M. de Quélen en faveur des orphelins du choléra ; la société des Amis de l’Enfance, sous la protection du saint enfant Jésus ; la société de Saint Vincent-de-Paule, qu’il ne faut pas confondre avec la société de Saint-Paul, et qui compte deux mille deux cents membres dans Paris, et des agens dans cinquante villes de la province ; l’œuvre de Saint-Charles, pour les prêtres âgés et infirmes ; la société de Saint-François Régis, pour la légitimation des enfans et la consécration civile et religieuse de ces ménages libres qui sont une des plaies des classes laborieuses : cette utile association a des succursales dans vingt-trois villes des départemens, et même une succursale à Constantinople. N’oublions pas non plus, dans un autre ordre d’institutions, mais toujours dans la sphère du bien pratique, la salutaire influence qu’ont exercée les idées catholiques, appliquées à l’organisation et à la direction de la colonie agricole de Mettray, des pénitenciers de Bordeaux, de Marseille et de Lyon.

Placées sous le patronage des membres du clergé, les sociétés chrétiennes de bienfaisance ont rallié à Paris comme quêteuses, présidentes, distributrices de secours, des dames du plus grand nom et des jeunes gens du monde élégant, qui partagent dans les divers quartiers de la capitale, avec MM. les curés des paroisses, les fatigues de la charité. À défaut de dotations suffisantes et de patrimoine foncier, les œuvres de charité ont recours aux cotisations annuelles, aux quêtes, aux loteries. La plupart d’entre elles publient chaque année le budget des recettes et justifient de l’emploi des fonds en présentant le chiffre des pauvres qui ont été secourus, le tableau des aumônes, soit en argent, soit en objets de première nécessité. Il convient