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employer l’expression propre, du papier-monnaie, et il s’est appliqué à exposer nettement son système sur tout ce qui se rattache à cet immense levier du crédit.

Dans les considérations qu’il a présentées pour établir avec précision ce qu’il entendait par l’étalon des valeurs (standard of value), il a renversé tantôt par un raisonnement, tantôt par des sarcasmes, ces définitions vagues, abstraites, mystiques, que quelques économistes anglais, dont l’esprit obéissait aux conséquences d’une première aberration, avaient données de la livre sterling en matière de crédit. Il a voulu, avant tout, débarrasser cette question essentielle de toutes les idées systématiques qui en cachaient la juste portée à tous les esprits, et la ramener au point de vue sous lequel il l’envisageait lui-même, c’est-à-dire à cette simple définition : que le papier-monnaie n’est qu’un signe représentatif de la monnaie. Il a fait justice, en passant, de toutes ces opinions creuses, erronées, qui, sous le nom d’école de Birmingham, étaient parvenues à égarer complètement les esprits sur la détermination de la valeur monétaire. Pour démontrer le vide de tous ces systèmes, il n’avait qu’à citer des assertions comme celle-ci : « Une livre sterling peut être définie une signification de valeur en rapport avec la circulation relative à la convenance ; » ou bien l’explication d’un autre écrivain : « L’étalon est une unité, la valeur numérique de cette unité est l’intérêt de 33-6-8, donnant 1/4, et cela étant payé en bank-note peut s’intituler monnaie de compte ; » ou enfin cette dernière définition qui a le mérite d’être plus inintelligible encore que les précédentes. : « L’étalon n’est ni or ni argent, mais quelque chose établi par l’imagination pour être réglé par l’opinion publique. »

Ici encore, il n’est question que des doctrines de ces économistes qui reconnaissent plus ou moins imparfaitement, il est vrai, mais qui pourtant avouent qu’il y a une livre sterling. Il en est plusieurs autres qui poussent la hardiesse jusqu’à nier franchement l’existence de la livre sterling, et s’abstiennent d’en donner la moindre définition dans leurs écrits. On sent qu’avec des adversaires qui traduisent de semblables rêveries en préceptes d’économie politique, sir Robert Peel avait peu à faire pour paraître asseoir son propre système sur les données les plus saines, les plus vraies, et pour défendre les principes de la convertibilité des billets de banque, à vue, au porteur, contre le principe si irrationnel de l’inconvertibilité du papier-monnaie. Toutefois, on ne peut méconnaître qu’il ait semblé appréhender de combattre face à face les théories sur la circulation qu’il désapprouve le plus. Ainsi, lorsqu’il dit que, de 1797 à 1818, l’esprit public se montra satisfait des théories sur l’inconvertibilité des billets de banque en numéraire, il exprime un fait vrai ; seulement il semble oublier que ce ne fut pas là une simple adoption d’idées, mais un état de choses forcé qui aurait été désastreux, si le commerce de l’Angleterre, par patriotisme, n’y avait entièrement souscrit. Ce fut dans un temps de guerre impitoyable, dans les années les plus calamiteuses, que