Page:Revue des Deux Mondes - 1844 - tome 7.djvu/182

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lui enlèvent insensiblement les débouchés extérieurs, et les forges de l’Écosse ; où l’on traite le minerai par l’air chaud, et qui emploient le minerai beaucoup plus riche (black band), peuvent livrer leurs produits à meilleur marché : au mois de juillet 1843, la fonte brute ne valait, sur les bords de la Clyde, que 40 shil. (50 fr.) le tonneau. À ce compte, Glasgow aurait pu donner pour moins de 120 fr. la tonne des rails qui coûtaient alors 150 fr. à Cardiff.

La crise de 1842 a bien montré de quel côté l’industrie métallurgique suivait un mouvement ascendant, et de quel côté elle tendait à décliner. La production totale de l’année 1842 n’est inférieure, à celle de 1839 que de 37 milliers de tonneaux ; mais la perte ne se répartit pas d’une manière égale entre les usines du royaume-uni. Il y en a qui ont accru leur production en dépit de la stagnation du commerce ; d’autres ont maintenu leur niveau ; d’autres enfin ont dû éteindre leurs feux. Ainsi, les forges méridionales du Staffordshire n’ont produit que 300,000 tonnes, au lieu de 346,000 ; les forges méridionales du pays de Galles ont rendu au contraire 457,000 tonnes, au lieu de 453,000 ; enfin les forges de l’Écosse, qui n’avaient donné que 37,500 tonnes en 1830, et 196,960 en 1839, en ont produit 238,750 en 1840, accroissement qui excède la proportion de 600 pour 100 en douze années.

Dans les époques d’activité commerciale, les ouvriers des forges et les mineurs qui travaillent pour les forges obtiennent des salaires très-élevés ; la moyenne n’est guère moindre de 3 sh. 1/2 à 4 sh. par jour (4 fr. 40 c. à 5 fr.) ; il leur est alloué en outre pour leur usage autant de houille qu’ils en peuvent emporter. On rencontre souvent sur les routes du Stafford la femme et les enfans du mineur qui s’éloignent du puits d’extraction, chargés entre eux de 80 ou 100 kilogrammes de houille qui se dressent en pyramides inégales sur leurs chapeaux. Aux époques de disette, le maître de forges et le propriétaire de mines ne suspendent pas le travail ; ils se bornent à le réduire, et le salaire diminue dans la même proportion. Les chefs de cette industrie se réunissent tous les trois mois pour fixer le prix du fer ; ils s’occupent aussi du sort des ouvriers. En 1843, dans un moment où de nombreuses faillites laissaient plusieurs milliers d’hommes oisifs, et où l’on craignait que ces multitudes affamées ne fissent une descente en masse sur Birmingham, la sollicitude des manufacturiers s’émut ; on ouvrit des souscriptions on distribua des alimens, on employa les hommes valides à tracer de nouvelles routes, et une grande calamité fut détournée.