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dépouiller de toutes les opinions, de tous les préjugés, de tous les vœux même de ses compatriotes : la marche qu’il suivit dans les questions financières, et son désir d’acquérir le Texas, le montraient assez. Au bout de dix-huit mois, M. Webster quitta le ministère et rentra dans le parti whig, au moment où celui-ci commençait à faire une opposition assez vive au président. M. Tyler, repoussé de ce côté, songea alors à s’attacher le parti démocratique. Ses amis de la Virginie, qu’il avait appelés avec lui au pouvoir, M. Wise, M. Gilmer, M. Upshur, appartenaient à ce parti. Son opinion sur la banque était celle des démocrates ; tout semblait l’en rapprocher. Le ministère fut donc modifié dans ce sens, et M. Tyler crut ne pouvoir mieux sonder le terrain qu’en remettant sur le tapis la question du Texas. On le savait partisan décidé de l’annexation ; c’était aussi le rêve favori de M. Upshur, successeur de M. Webster ; toutefois ce ne fut pas sans surprise qu’on vit paraître, le 10 janvier 1843, dans un journal semi-officiel, une lettre de M. Gilmer, sénateur de Virginie, sur l’annexation du Texas. M. Gilmer se déclarait partisan décidé de la mesure, et concluait qu’elle devait être accomplie immédiatement ou pas du tout (to be done soon or not at all). Une pareille démarche d’un homme étroitement lié avec le président parut une avance faite par celui-ci aux hommes du sud, et toute la presse des états à esclaves l’accueillit avec faveur. M. Walker, sénateur du Mississipi, ne tarda pas à publier, en réponse à M. Gilmer, un essai où il examinait les moyens d’annexer le Texas à l’Union, et prouvait la légalité de cette mesure. Alors la presse officielle rompit le silence, et se déclara en faveur, de l’annexation. C’était jeter le masque ouvertement et se tourner tout-à-fait du côté du parti démocratique. Cependant les efforts de M. Tyler n’avaient pas eu grand succès ; on avait accueilli ses avances avec reconnaissance : c’était tout. Il avait bien trouvé parmi les démocrates des gens disposés à accepter des emplois ; mais ils venaient seuls, sans lui apporter d’autre appui que leurs personnes, et la masse du parti démocratique restait groupée autour de M. Van Buren. Malgré son échec antérieur, celui-ci l’emportait encore de beaucoup en influence sur M. Calhoun, qui n’avait de crédit réel que parmi les nullificateurs. M. Tyler, ayant conçu le projet de rallier à lui le parti démocratique, résolut de profiter de la rivalité qui séparait MM. Van Buren et Calhoun, et quand la mort inopinée de M. Upshur laissa vacante la place de ministre des affaires étrangères, ce fut M. Calhoun qu’il y appela.

M. Calhoun, en arrivant aux affaires, y apporta cette promptitude et cette décision qui sont les traits distinctifs de son caractère ; il dé-