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principe même de l’annexation, bien que les conditions qu’il met l’annexation équivalent à une condamnation absolue, et que sa conclusion ait dû rassurer tous les whigs, qui ne sauraient sans exigence lui demander davantage. Ses amis du sud au contraire n’ont pas lieu d’être satisfaits. Toutefois, M. Clay a sur M. Van Buren cet avantage qu’il est citoyen du Kentucky, et que son élection y est une affaire d’amour-propre national : En outre, il est homme du sud, il a de nombreuses relations dans tous les états à esclaves, il est propriétaire d’esclaves lui-même ; c’est lui qui a fait autrefois les premières démarches pour l’acquisition du Texas. Comme il n’a pas condamné le principe même de l’annexation, on peut espérer qu’il subirait la mesure, si elle lui était imposée par la majorité des chambres. Enfin on avait prévu sa résolution ; c’était pour lui une nécessité de position, et l’on ne peut l’accuser d’avoir trompé l’attente de ses amis. Il est donc possible que M. Clay, tout en se prononçant plus nettement que M. Van Buren contre l’annexation, perde moins de voix que lui dans le sud.

Quel est maintenant le sort probable du traité soumis à l’approbation du sénat ? L’adoption de ce traité nous paraît impossible, et M. Tyler, en l’adressant au sénat, ne devait pas s’abuser sur le résultat. S’il n’avait fallu que la simple majorité, M. Tyler aurait pu espérer qu’en agissant activement auprès des whigs du sud, on pourrait les décider à se réunir pour une fois aux démocrates ; mais il faut les deux tiers des votes, et les whigs ont la majorité dans le sénat. Il paraît même que plusieurs démocrates, MM. Allen, Tapper, Benton, peut-être même MM. Wright et Fairfield, se sont prononcés contre le traité, et qu’un seul whig, M. Henderson, du Mississipi, a manifesté l’intention de l’appuyer. Il est donc probable que le traité sera déposé sur le bureau, c’est-à-dire ajourné indéfiniment, et peut-être même rejeté à une assez forte majorité. Dans ce cas, le président pourrait encore le faire reprendre par un des représentans de son parti comme une proposition individuelle ; pourtant, s’il a contre lui une forte majorité dans le sénat, il ne l’osera pas. D’ailleurs, je l’ai dit, il n’espérait pas faire passer le traité cette année ; il voulait seulement obliger ses adversaires à se prononcer et faire de cette question la question décisive pour les élections qui vont commencer. Or, son but est aujourd’hui complètement atteint.

Quel sera le résultat de ces élections ? c’est ce que nul ne peut prévoir encore. M. Clay aurait eu de belles chances, si la question du Texas n’avait surgi tout à coup sa lettre lui fera perdre bien des suffrages au sud ; d’un autre côté, elle lui attachera plus que jamais tous les whigs