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À vrai dire, depuis 1835 la position de M. Gil y Zarate n’a point changé le moins du monde ; comme il luttait alors il lutte en ce moment dans la presse et sur les scènes de la Cruz et del Principe. Hier encore, il était un des principaux collaborateurs du Semanario Pintoresco, fondé par le spirituel M. Mesonero de Romanos, et rédigé par toutes les célébrités espagnoles, MM. Zorilla ; Breton de los Herreros, Hartzembusch, Escosura, Pedro de Madrazo, et les autres enfin. C’est une destinée vraiment curieuse que celle du Semanario Pintoresco ; exclusivement consacré d’abord à la poésie et à la littérature, ce recueil fut bientôt, grace aux préoccupations de l’époque, envahi tout entier par les plus sérieuses discussions. C’est là que se sont le mieux débattues, avant 1840, les grandes questions d’économie politique et de réorganisation sociale ; c’est au Semanario de MM. Mesonero et Gil y Zarate que Madrid est redevable de ces belles salles d’asile où l’on recueille jusqu’à huit cents enfans sans famille ou sans pain. La collaboration de M. Gil y Zarate au Semanario consistait principalement en des biographies de personnages célèbres, écrites avec une fougueuse et énergique éloquence, et en des poésies lyriques, parmi lesquelles se sont fait remarquer une Ode à l’amnistie, où abondent les généreux sentimens, et un beau dithyrambe sur le siége de Bilbao. — Aujourd’hui, avec MM. de Rivas, Mesonero de Romanos, Enrique Gil, Aben-Amar (don Santos Lopez Pelegrin), M. Gil y Zarate concourt à la publication de Los tipos españoles, œuvre consciencieuse si nous en jugeons par les volumes déjà parus, et où l’on se propose de décrire aussi exactement que possible les mœurs actuelles de la Péninsule. Ce sont les études de M. Gil y Zarate, l’Employé en fonction, l’Ancien employé, l’Ancien moine, qui à notre avis forment jusqu’ici les meilleures pages de la collection Dans ces trois essais, la question est traitée au point de vue le plus élevé, et l’on peut citer comme un des plus pathétiques morceaux qui soient jamais sortis d’une plume espagnole celui où M. Gil y Zarate réclame un habit de bure et du pain pour les malheureux que les excès de la révolution et de la guerre civile ont chassés de leurs couvens.

Quels que soient, du reste, dans l’administration publique, dans l’enseignement, dans la presse, les précédens et la position de M. Gil y Zarate, c’est au théâtre que se poursuit sa vraie carrière ; c’est au théâtre que l’auteur de Un Año despues de la boda et de Don Guzman el Bueno peut agrandir encore son glorieux avenir. Les tragédies que don Antonio Gil y Zarate a composées dans les règles de l’école classique ont pour titre Don Rodrigo et Doña Blanca de Borbon. Le