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d’autre femme que toi !… Je sais que les peuples de Castille vont s’indigner encore de ma passion… et que m’importe ? Que tous les chevaliers d’Espagne appellent à leur aide tous les chevaliers de France, qu’ils unissent leur vaillance et leur colère, ils ne parviendront point à t’arracher de ces bras !… Au pied des autels, tu recevras ma foi éternelle… Monte sur le trône… règne, Maria, règne ! C’est le prix légitime de ton amour et de ta constance… Que tes ennemis se prosternent tremblans devant toi…

Doña maria. — Ah ! prince, que dites-vous ?… serait-il possible ?…

Don pedro. — Je le jure !

Doña maria. — Mais les dangers…

Don pedro. — Je les méprise !

Doña maria. — Vous oubliez que d’autres nœuds…

Don pedro. — Je les vais rompre ! Toi seule seras ma femme !…

Doña maria. — Vaines promesses ! Vous-même vous ne pourrez…

Don pedro. — Et qui s’opposera…

Doña maria. — Vos vassaux !…

Don pedro. — Mes vassaux ! Ah ! mes vassaux ! Qu’ils tremblent ! cette épée saura bien abaisser leur arrogance. Qu’ils choisissent entre l’obéissance absolue ou la mort C’est en vain que, dans leur orgueil insolent, ils attendent, aux abords du temple, pour imposer à leur roi un joug qu’il déteste ! Qui donc a osé commander ces fêtes ? Qui a osé faire ces préparatifs ? Qu’ils cessent, et à l’instant ! Moi-même, moi-même, je vais m’empresser d’y mettre ordre… Malheur à eux, s’ils essaient de me résister !…


En résumé pourtant, quels que soient, dans Don Rodrigo et Doña Blanca de Borbon, les mérites de pensée et du style, les tragédies classiques de M. Gil y Zarate ne forment point un titre durable ; nous en dirons autant de comédies nombreuses, — une seule exceptée, — qu’il a composées, non pas dans le genre de Molière, comme l’affirment les critiques de la Péninsule, mais bien dans celui de La Chaussée. À la vérité, nous ne nous chargeons pas de justifier par les détails une telle comparaison : il s’en faut de beaucoup que les personnages de M. Gil y Zarate appartiennent au genre larmoyant. Nous avons seulement voulu établir que pour M. Gil y Zarate, comme pour ses devanciers immédiats, comme pour La Chaussée, la comédie n’est le plus souvent, — nous pourrions citer Cuidado con las novias ! (Prenez garde aux fiancées !) et El Entremetido (l’Officieux empressé), — qu’un cadre philosophique, assez correctement dessiné, où défilent en bon ordre, revêtus pour ainsi dire de costumes bourgeois, personnifiés dans des types d’une très contestable originalité, les moralités sentencieuses et les prétentieux lieux-communs. Pour être juste cependant, nous devons reconnaître que, dans El Entremetido, on retrouve