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Nous savons que l’opposition constitutionnelle renferme d’autres candidats que M. Dupin. S’il suffisait, pour être nommé président de la chambre, d’être un orateur éminent, un chef de parti justement considère, nous savons que M. Dupin trouverait dans l’opposition constitutionnelle des concurrens sérieux ; mais leur caractère politique ne répondrait pas à la situation. Ils n’auraient pas d’ailleurs la majorité, tandis que le choix de M. Dupin convient à plusieurs fractions de la chambre, et caractérise nettement la lutte qui va s’ouvrir contre le cabinet. Du reste, si nous sommes bien informés, le ministère a des amis clairvoyans qui lui conseillent en ce moment d’abandonner M. Sauzet, et d’enlever M. Dupin à l’opposition. M. Dupin se laisserait-il enlever ? C’est une question. Dans tous les cas, l’opposition parlementaire ferait bien, selon nous, de proclamer le plus tôt possible son candidat. Si le ministère le lui prend, qu’on sache au moins qu’elle a été volée.

On sait que tous les ans la discussion de l’adresse est terminée au Luxembourg avant d’être commencée au palais Bourbon. Il en sera probablement de même cette année. La chambre des pairs est donc appelée à ouvrir le débat. Cette circonstance mérite d’être remarquée. Depuis plusieurs années les discussions politiques de la chambre des pairs ont rarement exercé sur l’opinion l’influence qu’elles devraient avoir. D’où cela vient-il ? De ce que les hommes éminens du Luxembourg prennent rarement la parole, de ce rôle politique, de ce qu’ils abandonnent la tribune à des discoureurs médiocres dont les réflexions banales ont peu d’attrait pour le public. Généralement l’opposition n’est pas facile au Luxembourg ; elle est surtout très difficile, dit-on, pour certains hommes qui ont traversé les affaires et qui ont une grande situation dans le pays. L’auditoire n’est pas bienveillant pour eux ; il les écoute avec défiance ; il suspecte leurs intentions ; il les prend pour des ambitieux mécontens qui s’agitent dans le but de ressaisir le pouvoir qu’ils ont perdu. Aussi, pour ne pas soulever contre eux des préventions injustes, ces hommes gardent ordinairement le silence : résultat fâcheux pour tout le monde, pour le pays d’abord qui se voit privé des conseils de leur expérience, pour la chambre des pairs dont l’éclat diminue ; fâcheux enfin pour ceux-là même qui n’osent braver les inconvéniens attachés à la renommée politique, car leur silence, en se prolongeant, affaiblit l’autorité de leur nom, et les expose à l’oubli de leurs concitoyens. Les hommes dont nous parlons vont être soumis à une nouvelle épreuve ; espérons qu’ils prendront un parti plus conforme à leurs intérêts. La session qui va s’ouvrir offre à la chambre des pairs un rôle important espérons qu’elle l’acceptera dans toute son étendue.

Après avoir soutenu la discussion pendant plusieurs mois, la presse devient à son tour spectatrice. Après avoir commencé l’instruction du procès, elle va voir comment ce procès sera jugé par les chambres. La presse de l’opposition s’est-elle trompée ? Les journaux du ministère le lui ont dit souvent ; nous verrons si leurs reproches étaient fondés. Quand à la presse de