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mais MM. Coletti et Maurocordato ont l’un et l’autre des sentimens trop patriotiques, des idées trop libérales, pour qu’une mesquine jalousie les empêchât de s’associer au triomphe de l’indépendance grecque et de la liberté. Ils accoururent donc pour prendre place au congrès, et, comme il arrive dans les grandes circonstances, les rivalités, les inimitiés, les dissidences partielles, se turent devant un intérêt supérieur. M. Coletti, malgré sa longue absence, restait le chef reconnu du parti national, des Rouméliotes surtout et de ceux qui avaient pris une part active à la guerre de l’indépendance. M. Maurocordato conservait la confiance d’une portion de la Grèce occidentale et d’un groupe d’hommes distingués M. Metaxas dirigeait la fraction du parti russe qui demeurait fidèle à la cause nationale. L’union de ces trois hommes semblait donc assurer, presque sans combat, le triomphe des idées modérées. Ce n’est pourtant pas sans une lutte longue et difficile quelles finirent par prévaloir. L’intrigue russe, en effet, trouva trop souvent pour alliés, d’une part, l’esprit étroit et exclusif du Péloponèse, de l’autre, les intérêts de quelques chefs palikares qui, pour maintenir certaines existences irrégulières, votèrent contre tout ce qui pouvait donner force et vie au pouvoir central. C’est ainsi, par exemple, que malgré, un admirable discours de M. Coletti, passa l’absurde décret des autochtones, ce décret qui, en excluant des fonctions publiques tous ceux qui ne sont pas nés dans les limites de la Grèce actuelle, ou qui n’y ont pas fait un long séjour, a le double inconvénient de mécontenter profondément les Grecs du dehors et d’enlever à l’état de bons et utiles services. Les constitutions d’Épidaure et de Trézène avaient fait précisément le contraire. Les sentimens de fraternité qui, doivent lier entre eux tous les Grecs, le souvenir des luttes passées, la pensée des luttes futures, tout devait engager l’assemblée de 1843 à suivre ce noble exemple. Malheureusement les jalousies péloponésiennes et les calculs russes coalisés l’emportèrent, au grand regret de tous les hommes prévoyans et de tous les vrais patriotes.

En faisant voter l’article 40 de la constitution, celui qui stipule que « tout successeur au trône de Grèce doit nécessairement professer la religion de l’église orientale orthodoxe du Christ, » le parti russe obtint un avantage. Plus important ; mais cette fois il s’appuyait sur le sentiment général du pays, et l’assemblée toute entière fit cause commune avec lui. Si le roi n’a point d’enfans, il n’en résulte pas moins, pour le jour de sa mort, un embarras sérieux : d’une part le traité de 1832, qui assure la couronne de Grèce au roi Othon et à ses héritiers