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Grégoire XVI venait à peine de monter sur le trône quand il apprit la révolte de Bologne : son premier mouvement fut d’appeler les Autrichiens et d’exciter les sanfédistes. Le cabinet français profita de l’alliance anglaise pour exiger la retraite des Autrichiens : l’Autriche demandait à son tour la diplomatie d’étouffer la révolution dans les États Romains. On tomba d’accord sur ce point ; la question réduite à ces termes n’étant plus qu’une affaire diplomatique, il ne restait qu’à arrêter les mesures anti-révolutionnaires, et de concession en concession la France et l’Angleterre étaient amenées à demander au gouvernement pontifical de rentrer dans le système autrichien, à l’exemple des autres états de l’Italie. On vit alors les cinq cours signer d’un accord unanime un mémorandum par lequel elles réclamaient de Grégoire XVI les réformes administratives nécessaires pour apaiser le libéralisme. Le congrès de Vienne n’aurait pas agi autrement, et sous une apparence plus libérale, c’étaient encore les vues du congrès de Laybach sur Naples ; mais la contre-révolution avait jeté de si profondes racines dans les États Romains, le gouvernement pontifical se trouvait tellement séparé de tous les gouvernemens modernes, que la diplomatie, presque à son insu, donnait par cet acte raison aux révoltés, et son mémorandum ne conduisait à rien moins qu’à une sécularisation du saint-siège. Grégoire XVI accorda tout : la libre élection des conseils municipaux, l’institution des conseils provinciaux, de nouveaux codes, la réforme des tribunaux, de l’administration, des finances, l’admission des séculiers dans les hauts emplois, dans le conseil d’état ; en un mot, le nouveau pape, d’après ses propres expressions, promettait une ère nouvelle a ses sujets. Au départ des Autrichiens, les promesses étaient formellement rétractées (5 juillet 1831) ; les libéraux se soulevaient une seconde fois, et de son côté le sanfédisme prenait les armes pour les contenir. Le cardinal Albani marcha à la tête des bandes pontificales et battit les libéraux à Césène ; ses soldats saccagèrent la ville, violèrent les femmes, pillèrent les églises. A Forli, les troupes du cardinal ne rencontrèrent aucune résistance, et cependant elles commirent des assassinats de sang-froid. On craignait de nouveaux massacres à Ravenne et à Bologne ; ce fut alors que la bourgeoisie bolonaise accueillit avec joie les Autrichiens, qui revenaient, pour une seconde occupation et empêchaient ou au moins les assassinats. La France riposta par l’occupation d’Ancône ; mais ici encore, malgré l’hostilité diplomatique de Paris et de Vienne, le langage libéral de Casimir Périer se conciliait au fond avec la pensée du cabinet autrichien. Quelle fut la conduite du gouvernement pontifical ? Sous