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La loi du 22 mars a pour instrument préventif une inspection gratuite, volontaire, et partant inefficace, pour instrument répressif la juridiction ordinaire, juridiction incompétente dans plusieurs cas, lente et coûteuse dans tous. Cette réforme, aujourd’hui purement nominale, ne prendra un aspect sérieux que du jour où l’on aura substitué à l’inspection gratuite l’inspection salariée, et la juridiction des conseils de prud’hommes à celle des juges de paix.

La surveillance des manufactures en Angleterre, en ce qui touche le travail des enfans, avait d’abord été confiée à quatre inspecteurs principaux, lesquels se faisaient assister par quinze surintendans. Chaque inspecteur recevait 1,000 livres sterling par an (25,000 francs), y compris les frais de tournée ; les surintendans, pris dans une condition plus humble et n’ayant pas à se déplacer, touchaient 350 livres sterling (près de 9,000 francs). Les inspecteurs n’avaient pas de communications entre eux, et le seul lien qui les rattachât au ministère de l’intérieur (home office) était l’obligation d’adresser tous les trois mois, sans préjudice des communications accidentelles, leurs rapports au secrétaire d’état.

Une loi récente a modifié cet état de choses. Le traitement des sous inspecteurs a été élevé, et l’on a institué, près du ministère de l’intérieur, un bureau central où les inspecteurs doivent se réunir périodiquement, afin de conférer entre eux et avec le ministre et de mettre, par suite de ce concert préalable, plus d’unité dans leur action. Le bureau des inspecteurs, servant de dépôt pour les documens qui concernent les manufactures, ne tardera pas à renfermer les archives de l’industrie. Il y a là un véritable mais timide essai de centralisation, tel qu’il pouvait être dans un pays où chaque localité, comme la couronne elle-même, prétend ne relever que de Dieu et de son droit.

La centralisation n’est pas à créer en France. Il existe au ministère du commerce un bureau des manufactures, auquel on pourrait rattacher, en l’élevant au rang d’une direction générale, toutes les dispositions nécessaires pour l’exécution de la loi ; mais l’inspection, devant embrasser, soit que l’on s’arrête aux ateliers qui renfermeront vingt ouvriers, soit que l’on descende jusqu’à ceux qui en contiendront plus de dix, une surface beaucoup plus étendue que le terrain délimité par la loi anglaise, exigerait aussi un personnel plus nombreux.

J’ai déjà indiqué la convenance de combiner les dispositions de la loi qui règle le travail des enfans avec celles de la loi qui organise l’enseignement primaire. Il ne me parais pas moins indispensable de