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les ouvriers. Celles auxquelles manque cette condition sont bientôt atteintes par des concurrens éloignés. C’est donc à la culture du bassin de Calais à consolider les bases de la précieuse conquête qu’a fait le pays dans la fabrication du tulle.

La principale importance maritime de Calais est due à la petite pêche : celle-ci entretient un personnel naval d’une vigueur et d’une intrépidité peu communes. La culture des terres basses du voisinage fournirait à la marine un élément de travail, peut-être aussi considérable que la pêche. Le bon marché des subsistances pour la population manufacturière de Saint-Pierre n’a rien d’inconciliable avec une large exportation de denrées pour l’Angleterre ; l’un et l’autre seraient les conséquences du développement de la production agricole. A l’aspect des ressources inertes du territoire de Calais, des besoins du marché de Londres, du peu de distance qui les sépare, on s’étonne que l’association d’une famille de jardiniers avec une famille de marins n’ait point encore commencé à exploiter cette réunion de circonstances favorables. Et qu’on ne dédaigne pas, à cause de sa vulgarité, cet aliment que la culture, offrirait à la navigation : une valeur d’un million occupe cent fois plus de matelots en denrées agricoles les plus communes qu’en bijoux ou en étoffes précieuses : ce sont les matières encombrantes qui font l’activité de la navigation, et partout où se trouvent des chargemens nombreux toujours prêts, se trouve aussi une marine locale énergique et vivace.

Les travaux de dessèchement et de canalisation nécessaires pour la mise en valeur complète du territoire de Calais veulent être exécutés dans des vues d’ensemble auxquelles doit présider l’administration. Sa haute direction est d’autant plus indispensable, que ces travaux se rattachent aux plus précieux intérêts de la navigation et l’aménagement des tourbières, richesse dont la reproduction exige de si longs espaces de temps, que l’exploitation en est, pour les générations qui s’y livrent, l’équivalent d’un anéantissement complet. Malheureusement l’administration semble n’avoir pas embrassé ici toute l’étendue de sa mission ; exécutant de grandes choses, elle les a laissées incomplètes et par conséquent stériles. Le canal de Saint-Omer débouche dans le port de Calais, qui communique ainsi avec tout le département du Nord, avec Arras, le canal de Saint-Quentin et Paris ; les bateaux de l’intérieur partagent le bassin avec les navires, et les chargemens s’échangera entre eux avec une économie et une promptitude autrefois inconnues : on a compris avec raison dans les travaux du port la