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Les ordres donnés par les chefs aussi bien que les communications faites par les inférieurs, les renseignemens fournis sur le personnel, les enquêtes disciplinaires, les informations sur l’état du service, les affaires même qui intéressent des parties privées et qui sont du ressort de l’administration, tout exige le secret. Sans le secret, plus de confiance ni de sécurité ; chacun craint de se compromettre ; on a peur de se faire des ennemis. Le service est ainsi arrêté par mille résistances ; les meilleures mesures sont combattues par ceux qu’elles froissent, et qui, avertis à l’avance, font jouer tous les ressorts de l’intrigue : l’autorité perd son indépendance et par conséquent sa force. C’est à regret que nous ajoutons qu’en dépit des prohibitions insérées dans la plupart des règlemens, ce secret si nécessaire est trop souvent violé. L’exemple de l’indiscrétion est parti des rangs les plus élevés. En livrant des correspondances confidentielles à la publicité de la tribune, on a sacrifié un besoin permanent à des nécessités accidentelles. Tous les subordonnés ont ainsi reçu un avertissement qui n’a pas été perdu. Chacun s’efforce, à l’envi de se mettre à couvert en divulguant les ordres ou les instructions qu’il a reçus. Il est des curiosités qui s’imposent et ne souffrent pas qu’on les éconduise : tous les cartons leur sont ouverts ; les lettres des fonctionnaires intermédiaires leur sont livrées. D’autres désordres se commettent. Une presse hostile et presque toujours mal informée reçoit des communications qu’elle reproduit sous un faux jour, et qui ne peuvent lui être faites par les agens même du pouvoir sans le plus coupable abus de confiance. Il serait temps de rompre des habitudes qui ne tendent à rien moins qu’à rendre le gouvernement impossible.


V.

Jusqu’ici le fonctionnaire n’a été considéré que dans ses devoirs les plus généraux envers l’état, et, si nous osons ainsi parler, dans les principes de morale qui lui sont propres. Suivons-le maintenant dans ses relations avec le public, quand le public a directement affaire à lui, dans ses rapports avec les autres ordres de fonctions, et enfin dans la vie privée.

Il est des circonstances nombreuses où un contact immédiat s’établit entre les citoyens et les agens de l’autorité. La perception des revenus publics, la police, les services dont l’état s’est attribué le monopole, en fournissent les occasions les plus habituelles ; des obligations spéciales en sont la conséquence. S’agit-il du paiement de l’impôt,