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contraire, il en est que la faveur a élevés, ils dédaignent les obligations de leur emploi, comme ces hommes que le hasard a enrichis, et qui jettent au vent une fortune trop aisément acquise. Les favoris de la politique se font remarquer parmi ces contempteurs du devoir : dignes successeurs de ces anciens courtisans que d’autres caprices avaient pourvus, et qui soulevaient les plaintes répétées des états-généraux. Les fonctions bien acquises sont donc les mieux remplies. C’est ainsi qu’un régime régulier porte ses fruits, et que, par une heureuse nécessité, l’intérêt du service s’allie toujours avec le respect des droits et la récompense accordée au travail.

Malheureusement la loi morale n’exerce pas toujours son empire. Le service souffre, la règle est méconnue, une répression devient nécessaire ; elle est confiée au pouvoir disciplinaire. Toute obligation doit avoir sa sanction, et le fonctionnaire, pour les devoirs qui lui sont propres, est soumis à une juridiction spéciale et à un code particulier. Les formes et les attributions du pouvoir disciplinaire sont en rapport avec la nature des infractions et des emplois. La même faute peut être diversement appréciée, selon sa gravité relative. Ainsi, les règlemens demandent plus spécialement au magistrat de garder intacte la dignité de son caractère, au militaire de respecter les lois de la discipline au comptable de veiller religieusement sur sa caisse. Sous des noms divers, les peines disciplinaires varient peu entre elles. Les unes sont purement morales : elles consistent dans les avertissemens, les censures, les réprimandes. Les autres affectent l’état ou les émolumens des fonctionnaires : selon, que l’emploi le comporte, le coupable est privé de gratifications, exclu de l’avancement, condamné à descendre de classe ou de grade, suspendu avec perte de traitement, destitué. Plusieurs décrets soumettaient aussi certains fonctionnaires, par exemple ceux des ponts-et-chaussées et de l’université, à la peine des arrêts pour des fautes légères. Cette peine est à présent réservée exclusivement à l’armée. — Il est des fonctions ou l’on jouit de garanties spéciales quant à l’exercice de la juridiction disciplinaire, particulièrement dans les cas les plus graves. Dans les administrations centrales et dans les services financiers et administratifs, les avertissemens ou les réprimandes sont prononcés par les chefs intermédiaires, la suspension ou la révocation par le ministre seulement, après que l’employé a été entendu. Les règlemens des ministères de la guerre et du commerce veulent en outre, avant la suspension ou la destitution, que les faits soient constatés par une commission d’enquête. L’emploi de l’officier ne peut être suspendu ou retiré que par décision royale, sur