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la majeure partie des promenades ; j’omets le reste. Le nom de M. le comte Munch-Billinghausen demeure associé dans la mémoire des habitans à celui de son maître, l’empereur François.

Francesbad se compose aujourd’hui d’une soixantaine de maisons, disposées suivant quatre larges rues parallèles. Par une de leurs extrémités, ces rues aboutissent à un joli jardin planté à l’anglaise, et que l’on nomme le Pare, bien qu’il ait le mérite, fort estimable à mes yeux, de se fondre insensiblement dans la campagne ; par l’autre extrémité, elles donnent sur une vaste prairie, arrosée par le petit ruisseau de Schlatta, à peu de distance duquel sourdent, en suivant sa rive, toutes les sources. Ainsi, d’un côté l’on se guérit, et de l’autre on se promène. Les maisons sont en général vastes et bien bâties. Toutes, sans exception, sont destinées aux baigneurs. L’église, à demi enfoncée dans les ombrages du Pare, a été érigée par l’empereur François, à la suite du séjour qu’il fit à Francesbad, durant la mémorable année de 1812, avec sa fille l’impératrice des Français. Elle est d’un effet assez agréable, et son clocher peint en bleu semble souvent se perdre dans l’azur du ciel. A l’opposé, dans l’axe de la rue principale, plantée dans toute sa longueur en marronniers, se dessine une petite rotonde dans le style grec, touchée avec un goût parfait : c’est, comme l’on dit à Francesbad, le Temple de la source de François, la déesse Hygie de l’endroit. Tout auprès s’étend une colonnade destinée à abriter les buveurs quand le mauvais temps les empêche de se promener en plein air. Ouverte d’un côté sur un jardin, de l’autre elle est garnie de boutiques de toute espèce : c’est un petit Palais-Royal, un peu rustique toutefois. Derrière, se trouve l’édifice des bains, attenant à la source de Louise’ et à la prairie dont le sol fournit les boues salines, si héroïques dans diverses maladies ; dans l’autre direction, on rencontre tout d’abord l’édifice destiné aux bains de gaz, bâti juste au-dessus de l’orifice par lequel le gaz carbonique s’échappe continuellement du sein de la terre comme le vent d’un soufflet de forge ; puis, un peu plus loin, dans le milieu de la prairie, une magnifique colonnade de cent cinquante mètres de longueur, terminée par deux pavillons, dont l’un contient la source Salée et l’autre la source des Prairies.

Grace à des acquisitions successives de terrain, les plantations, qui se bornaient primitivement aux massifs du Parc, se sont développées à droite et à gauche, et enceignent dès à présent, sauf de légères lacunes, tout le groupe des maisons, en se prolongeant jusque sur la Schlatta. Ainsi, la ville est en quelque sorte emprisonnée dans une couronne de jardins. On ne peut nier qu’en général les arbres n’aient été disposés avec beaucoup d’art, et que l’effet, eu égard à la mauvaise qualité du sol et à la nature du climat, ne soit assez satisfaisant. Il suffit de dire que c’est à l’obligeance de. M. le conseiller d’état de Riedel, connu dans toute l’Allemagne par son habileté en ce genre, que Francesbad doit le tracé d’une partie de ces jardins ; mais je ne puis m’empêcher de regretter que l’on n’ait pas adopté dès l’origine, pour l’ensemble de la ville, un autre plan que cette disposition monotone