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Il est rare que mais elle y mène par le dérèglement de la conduite, par une dégradation qui dégénère à la longue en une sorte de sauvagerie. On a évalué à 55,000 ames la partie vicieuse de la population parisienne ; sur ce nombre, dans lequel les hommes sont en majorité, 25,000 personnes peuvent être conduites devant les tribunaux par l’irrégularité de leur vie, sans être précisément malfaisantes : les 30,000 autres constituent cette classe dont la démoralisation effrontée, dont l’audace coupable sont pour les citoyens paisibles un danger permanent. Parmi ceux qui commencent par la filouterie pour arriver à l’assassinat, le plus grand nombre, n’en doutons pas, sont des malheureux qui n’ont pas eu assez de force morale pour résister aux mauvais conseils de la misère. Les 20,000 femmes suspectes que Paris renferme, à ce qu’on assure, ne sont-elles pas presque toujours des ouvrières à qui il eût été difficile de proportionner leurs ressources légitimes à leurs légitimes besoins ? C’est de cette classe que sortent les créatures dégradées qui en viennent à faire métier de la débauche. On en comptait, il y a peu d’années, environ 8,000, dont la moitié trouvait moyen de se soustraire à la surveillance, de la police.

Hâtons-nous de parcourir les neuf prisons de Paris énumérons les diverses catégories de détenus qu’elles renferment. Nos chiffres, relevés sur les états officiels, exprimeront une moyenne de sept années, de 1836 à 1842 inclusivement : jeunes garçons détenus, sans accusation préalable et par mesure de correction paternelle, 24 ; reclus par mesure de précaution administrative infirmes, malades dangereux, enfans en bas âge, 432 hommes et 751 femmes ; prisonniers pour dettes envers le gouvernement, 24 ; prisonniers pour dettes incarcérés sur la poursuite de créanciers particuliers, 150 hommes et 8 femmes. Ce dernier chiffre montre que nos mœurs commerciales sont heureusement loin de la rigidité anglaise. Avant l’adoption d’un bill voté récemment sur la motion de lord Brougham, les trois prisons de Londres contenaient 620 débiteurs, dont la plupart étaient incarcérés pour des sommes très faibles. Le nouveau bill, ayant statué qu’on n’encourrait plus la perte de la liberté pour une dette inférieure à 20 livres sterling, a réduit immédiatement le nombre des détenus à 250. Il y a ordinairement dans les prisons de Paris 1,200 hommes environ et 250 femmes, retenus sous le coup d’une prévention, ou dont la condamnation n’est pas définitive. Quant aux condamnés qui ont eu à subir leur peine dans les geôles du département, la moyenne en a été de 1,440. Ce nombre se décompose ainsi : condamnés correctionnellement