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minorité, paraît toujours prête à se rompre quand il s’agit de constituer un vrai parti de gouvernement. Le ministère résiste à toutes les bourrasques avec constance, avec fermeté, avec succès ; mais il ne s’est pas encore complété, et plus d’une crise intérieure l’a déjà ébranlé. Il n’est pas enfin un des anciens partis qui ne se subdivise en trois ou quatre nuances, dont quelques-unes ont reçu déjà des noms nouveaux, celui des audacieux, par exemple, et celui des ultrà-autochtones. Ajoutez que, dans cette mêlée, quelques personnes passent sans cesse d’un camp à l’autre, ce qui augmente encore la confusion.

Ce n’est pas là, j’en conviens, une situation fort rassurante, et l’assemblée nationale avait mieux débuté. Voyons pourtant comment la chambre nouvelle s’est laissé entraîner dans la voie fâcheuse où elle est, et s’il y a chance qu’elle en sorte. Le sujet est, je le sais, difficile et délicat ; mais au point où en sont les choses, c’est, je le répète, par la vérité qu’on peut être utile à la Grèce, non par de vains ménagemens.

Pendant l’assemblée nationale, grace à l’union de MM. Coletti et Maurocordato, grace aussi au concours des hétérochtones, il s’était formé une majorité modérée, une majorité qui avait su se mettre au-dessus des préjugés étroits d’une partie de la population. Une seule fois cette majorité faillit à elle-même. Ce fut le jour où elle adopta l’absurde décret qui ferme la porte aux Grecs du dehors. Dans tout le reste, elle montra autant de prudence que de patriotisme. La minorité se composait alors, d’une part, des napistes, de l’autre, des autochtones, Péloponnésiens pour la plupart. Comme dans ses vues bien connues, la Russie a toujours eu soin de fomenter les préjugés autochtones, il y avait depuis long-temps entre ces deux fractions de certains rapports. Le besoin de la lutte commune les unit davantage, et à elles vinrent se joindre les esprits turbulens qui, pour un motif ou pour l’autre, se détachaient de la majorité. Le ministère Maurocordato se constitua, les élections eurent lieu, et c’est surtout contre la minorité napi-autochtone que furent dirigées les batteries ministérielles. Malheureusement, j’ai regret de le répéter, on ne se borna pas à la combattre par les moyens légitimes d’influence qui appartiennent à tout gouvernement ; la corruption, la fraude, la violence, tout fut mis en usage, et tout échoua. On a prétendu, on prétend quelquefois encore, que le ministère Maurocordato s’est retiré devant l’émeute. Cela est faux. Ce ministère s’est retiré devant la certitude d’être en minorité dans la chambre, devant la crainte d’une accusation s’il osait se présenter, Quoi qu’il en soit, M. Maurocordato tombé,