Page:Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 16.djvu/819

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de liens et de rapports suivis. Les comices d’un même département, pour atteindre réellement le but de leur institution, devraient correspondre régulièrement les uns avec les autres, se communiquer leurs travaux et se faire de ces communications une obligation rigoureuse. La société d’agriculture du département servirait de lien à tous les comices locaux, elle les informerait des faits agricoles qui pourraient se produire hors du département, et elle serait elle-même en correspondance avec les sociétés analogues remplissant les mêmes fonctions pour les départemens compris dans la même région. Toutes ces correspondances aboutiraient à la Société royale et centrale d’agriculture, appelée ainsi à recevoir, pour les répandre, les lumières de toute la France agricole, à donner l’impulsion au mouvement agricole, c’est-à-dire au progrès indéfini de la prospérité de la nation. Ce beau rôle est malheureusement vacant. »

Ces sages réflexions méritent bien qu’on les accueille. En effet, on n’en est plus, comme il y a trente ans, à combattre uniquement pour la suppression des jachères. Les horizons se sont agrandis ; tout en s’occupant d’agriculture, on a touché aux problèmes les plus élevés de l’économie politique, et, comme nous aurons occasion de le voir à propos des congrès agricoles, il y a unanimité pour appeler des réformes, réformes d’autant plus urgentes que ceux qu’elles intéressent le plus directement ne sont point toujours en mesure de les réclamer eux-mêmes. Ce sont les sociétés savantes qui les ont abordées et discutées pour la première fois ; c’est au gouvernement qu’appartient le droit de les résoudre. En ajourner indéfiniment la solution, ce serait peut-être compromettre l’avenir.


VII.

Jusqu’ici nous avons vu, pour ainsi dire, l’esprit d’association enfermé dans les diverses spécialités des connaissances humaines, circonscrit dans les limites des villes et tout au plus des départemens. Les sociétés savantes, il est vrai, cherchent autant que possible à étendre leurs relations en multipliant le nombre de leurs correspondans ; mais ce ne sont là d’ordinaire que des relations fictives. On a senti le besoin de se voir, de se parler, de s’éclairer mutuellement, et aujourd’hui, pour donner à leurs travaux plus d’ensemble et d’unité, les membres d’un grand nombre d’académies de province se réunissent annuellement dans l’une des principales villes du royaume. Ces réunions, on le sait, ont reçu le nom de congrès.

Essentiellement nomade et souvent encyclopédique, le congrès, allemand d’origine, est maintenant naturalisé dans la plupart des états de l’Europe, et sans aucun doute il est destiné à grandir encore et à former un nouveau lien entre les peuples. En Angleterre, il a atteint, dès l’abord, les proportions gigantesques du meeting, et à la réunion de Newcastle, en 1838, on ne comptait pas moins de 3,200 savans. L’Italie elle-même, malgré sa somnolence, s’est associée à ce mouvement, et le congrès de Naples, en 1845, a réuni plus de 1,200 personnes. Il est vrai qu’on servait gratuitement des sorbets, et que la musique de la garde royale exécutait aux heures du dîner et dans la soirée, après les séances, de très belles symphonies.