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Telle était l’attitude hostile adoptée par Nelson vis-à-vis du plus important allié de l’Angleterre ; mais les événemens allaient bientôt rappeler son esprit ardent et mobile vers un autre théâtre. Les succès de Championnet n’avaient pu malheureusement exercer qu’une faible influence sur l’issue des grandes opérations qui allaient s’ouvrir. L’Autriche, informée de l’approche des Russes, s’était enfin mise en mouvement, et la nouvelle coalition comptait déjà plus de 300,000 hommes sous les armes. Le directoire était mal préparé contre ces attaques formidables. Dès l’ouverture de la campagne, l’archiduc Charles rejeta Jourdan du Danube sur le Rhin et le général Cray poussa Schérer de l’Adige sur le Mincio, du Mincio sur l’Adda, où Suwarow, réuni au baron de Melas, eût peut-être détruit notre armée ; si le génie de Moreau n’en eût protégé la retraite. Ces premiers revers eurent, pour résultat d’obliger les 28,000 hommes qui occupaient Naples et les États Romains a évacuer leurs récentes conquêtes. Appelé à remplacer Championnet dans ces circonstances difficiles, Macdonald rappela les troupes qui, sous les ordres du général Duhesme, poursuivaient à outrance quelques bandes de paysans insurgés qui désolaient déjà la Pouille et la Calabre, laissa garnison dans le fort Saint-Elme, Capoue Gaëte et Cività-Vecchia, et, le 22 avril, commença à se replier sur la Toscane, pendant que Moreau se retirait vers la Rivière de Gênes.

La nouvelle république se trouva donc abandonnée à ses propres forces ; mais tout ce que Naples renfermait de noms illustres et d’hommes considérés était déjà compromis pour sa cause. Les nobles odieux à la cour, les propriétaires suspects aux lazzaroni, s’étaient spontanément réunis pour défendre leur vie et leur fortune contre les violences d’une populace effrénée ; un légitime instinct de conservation les avait faits républicains. Le pouvoir exécutif fut confié à cinq directeurs. Hercule d’Agnese, Napolitain naturalisé en France depuis trente ans, présida cette commission. Dominique Cirillo, un des médecins les plus estimés de l’Europe, dirigea les travaux du corps législatif. Un ancien capitaine d’artillerie, Gabriel Manthonè, fut nommé ministre de la guerre et général en chef de l’armée napolitaine. La garde du Château-Neuf fut confiée au chevalier Massa, ingénieur militaire, celle du fort de l’OEuf au prince de Santa-Severina. Le général Bassetti fut placé à la tête de la garde nationale ; le prince Caracciolo eut le commandement de quelques chaloupes canonnières qui composaient alors toute la marine de la république. Ettore Caraffa, comte de Ruvo et duc, d’Andria, Schipani, Calabrois de naissance, élevé récemment du grade de lieutenant à celui de général, commandaient les détachemens que le gouvernement napolitain avait réunis aux troupes du général Duhesme. De nouvelles levées se préparaient à soutenir ces deux premières colonnes : 3,000 hommes formèrent la légion calabroise, le duc de Rocca-Romana