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c’est le privilège qu’a cette chaîne de montagnes, de plus de quatorze mille kilomètres de long, d’offrir des gisemens d’argent avec une fréquence et une puissance sans pareilles.

Prenez une carte du Mexique et pointez-y toutes les localités où une mine d’argent a été exploitée, ainsi que celles où des indices ont été signalés ; elles occuperont sur la carte, avec d’assez faibles solutions de continuité, une ligne droite oblique à 45 degrés par rapport à l’équateur, du 16e au 30e degré de latitude[1]. Le développement de cette ligne oblique est de plus de deux mille kilomètres. Au nord, ce sont les mines des environs de Guaimas, de Batopilas, de Morelos, de Guadalupe y Calvo ; au centre, Guanaxuato ; au midi, ici Tlapujahua, Angangueo, Sultepec, là Pachuca, Real del Monte et Chico. Souvent le même filon est reconnu sur de longues distances. Ainsi la Veta Madre de Guanaxuato était exploitée, dès 1803, sur une longueur de treize kilomètres. Il faut qu’un de ces déchiremens qu’a subis la croûte de la planète à diverses époques, des milliers de siècles avant l’apparition de l’homme, se soit ainsi opéré au Mexique suivant cette direction à peu près rectiligne. Disons plus, ce phénomène semble s’être reproduit au même instant dans le nouveau continent, sur toute la longueur de l’immense chaîne des Andes. Alors une abondante injection de matières argentifères venues de l’intérieur du globe en aura pénétré l’enveloppe pétrifiée et en aura comblé les fissures. Des similitudes bien constatées autorisent à considérer les innombrables filons disposés au Mexique le long de la ligne de deux mille kilomètres que nous venons d’indiquer comme ayant ainsi une origine commune qui les aurait ouverts et remplis au même instant. Ils sont tous dirigés de même et ils sont formés à peu près des mêmes substances.

Quelle idée n’a-t-on pas des ressources du Mexique en métaux précieux, quand à l’argent on ajoute l’or que le pays présente ! On verra cependant que la production de l’or est beaucoup moindre que celle de l’argent, je ne dis pas seulement en poids, mais même en valeur.

Les mines de métaux précieux ont pour le Mexique cet avantage particulier que, seules aujourd’hui, elles peuvent lui fournir un objet de grande exportation. La cochenille, dont le Mexique a le privilège d’être presque le seul fournisseur, n’entrait dans ses envois au dehors, à l’époque où le pays était le plus florissant, que pour 12 millions de fr.[2].

  1. Duport, Production des Métaux précieux au Mexique, p. 377.
  2. C’est, après les métaux précieux, le principal objet d’exportation. La vanille, la salsepareille, le jalap, dont le Mexique est un des plus importans producteurs, étaient expédiés pour une valeur collective d’un million, l’indigo pour un peu plus, mais il provenait presque en totalité de Guatimala, dans l’Amérique centrale. Les bois de teinture peuvent donner lieu à un fret assez considérable, mais ne représentent sur les lieux qu’une très faible somme. Le Mexique a exporté sous le régime colonial des farines et du sucre ; il a cessé aujourd’hui.