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prussienne. De là, pour l’instant, les bruits les plus contradictoires, suivant que l’une ou l’autre impulsion a le dessus, tantôt l’incorporation immédiate de Brème au Zollverein sur la base du système différentiel, tantôt un traité de la Prusse avec l’Angleterre sur la base libérale. Le gouvernement ne parle que pour tout démentir.

Il y a néanmoins dans les relations actuelles de la Prusse et de l’Angleterre un temps d’arrêt et d’indécision qui doit contribuer pour beaucoup, non point à détourner (le flot est irrésistible), mais à modérer, à contenir la passion avec laquelle on a poursuivi jusqu’à présent l’idée d’une nouvelle alliance allemande de commerce et de navigation. Le traité conclu en 1841 entre l’Angleterre et le Zollverein devait expirer au 1er janvier 1848 ; la correspondance, maintenant publique, de lord Palmerston et du chevalier Bunsen nous apprend que ce traité ne sera pas renouvelé. Après des plaintes réciproques, on est seulement convenu, sur la demande du ministre prussien, de conserver provisoirement le statu quo, sauf à se prévenir six mois d’avance quand on y voudrait renoncer. Lors de la discussion approfondie qui s’éleva le 17 mai dans la chambre des seigneurs au sujet des droits différentiels, on s’étonna, comme je l’ai dit, de l’affectation avec laquelle le ministre des finances refusa de prendre parti pour ou contre. Le gouvernement, qui avait fait ce beau mémoire de 1845, semblait douter de l’œuvre qu’il poursuivait cependant toujours, et sa confiance paraissait si peu solide, qu’il se bornait à promettre de peser soigneusement tous les argumens dans une cause dont il avait été deux ans plus tôt le zélé promoteur.. C’est qu’on était en présence de menaces toutes fraîches de lord Palmerston : on ne voulait point aigrir par des épanchemens de tribune une correspondance diplomatique qui s’annonçait déjà dans des termes suffisamment acerbes. La séance avait lieu le 17 mai ; le 11, lord Palmerston écrivait au comte Westmoreland cette lettre dont le style a son prix :


Lord Palmerston au comte Westmoreland.


Foreign office, 11 mai 1847.

« … Le gouvernement anglais sait que le but réel de ceux des états du Zollverein qui travaillent à empêcher le renouvellement du traité de 1841 est de préparer ainsi les voies à l’introduction d’un système de droits différentiels dirigé contre la marine anglaise, lequel système ne pouvait se réaliser tant que ce traité restait en vigueur. Le Zollverein, d’après toutes les conjectures, espère obtenir des états maritimes de l’Allemagne du nord qu’ils accepteront ces droits différentiels.

« Il ne sera point difficile à votre seigneurie de montrer que les gouvernemens contre lesquels on dirige de pareils droits peuvent toujours y répondre