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en 1723, sous le règne de l’empereur Charles VI (Charles III en Hongrie), l’hérédité de la couronne, qui n’avait d’abord été assurée qu’aux mâles de la maison impériale, fut étendue à la ligne féminine.

Après avoir fait si belle la part de la royauté, il fallait assurer aux états quelques compensations. On leur accorda la confirmation de la plupart des privilèges qu’on s’efforçait de leur arracher depuis un siècle. Il fut arrêté que « les prérogatives fondamentales de la noblesse, établies par la bulle d’or d’André II, seraient maintenues comme partie intégrante de la constitution, à l’exception de la prérogative indiquée dans l’article 4 » (la clause de résistance dont nous avons parlé). 11 fut arrêté aussi que les diètes auraient lieu à des époques régulièrement fixées, qu’on y traiterait les affaires publiques, cum moderamin et sub silentio. Toutefois la plus importante de ces compensations accordées alors à la Hongrie fut l’établissement d’une sorte de grand conseil d’état qui tient encore aujourd’hui une place considérable dans l’administration du royaume sous le nom d’excelsum concilium locum tenentiale hungaricum. Les états exposèrent que ce conseil, fondé par saint Étienne lui-même, restauré par Ferdinand II, mais aboli depuis par les malheurs des temps, était nécessaire à l’administration du royaume. Il devait siéger sous la présidence du palatin ou du juge de la cour {judex curiæ), et se composer de vingt-deux conseillers pris dans toutes les parties du royaume parmi les prélats, les magnats et les nobles. Ses attributions étaient de veiller à l’exécution des lois, à l’instruction publique, à la tutelle des fils de familles nobles et à la gestion de leurs biens, à la colonisation des terres incultes, à la protection du commerce et de l’industrie, aux précautions à prendre contre l’incendie et les inondations. Ce conseil, qui, nous l’avons dit, subsiste encore, va se trouver, par les nouveaux événemens qui isoleront plus ou moins la Hongrie de l’Autriche, le centre et le principal instrument de l’autorité nationale. Avec cette institution et les attributions légales du palatin, les Hongrois ont sous la main une machine de gouvernement qui peut fonctionner librement, sans compromettre leur union avec l’Autriche, et sans les exposer aux chances des révolutions ou des guerres. Au-dessous de ce conseil d’état, mais indépendantes dans leur sphère, les congrégations (conseils provinciaux) établies dans chaque comitat auprès du comte suprême, pour régler les affaires politiques et judiciaires, réélire tous les trois ans les magistrats, défendre au besoin les intérêts des paysans contre leurs seigneurs, complétaient un système de garanties contre la puissance que la succession, désormais héréditaire, devait mettre aux mains du souverain.

L’union que la Hongrie venait de conclure avec la maison d’Autriche ne fut jamais plus intime et plus féconde, pour la gloire et le bonheur du pays, que sous le règne de Marie-Thérèse (1741-1780).