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de 1821 ; enfin, sans doute pour que la liste de ses titres auprès du gouvernement issu de la révolution milanaise fût complète, M. Sopransi était beau-frère du général Welden. Tandis que vingt-sept de nos malheureux volontaires étaient mutilés d’abord et fusillés ensuite dans les fossés qui entourent la ville de Trente, par ordre et sous les yeux du général Welden, M. Sopransi, devenu l’un des directeurs de la police milanaise, se disait appelé à préserver le pays de tout complot séditieux tenté en faveur de l’Autriche. Il faut bien dire quels furent les résultats de la confiance accordée au beau-frère du général Welden.

Les communes de Lombardie sont groupées par district, et chaque district est présidé par un commissaire de police qui cumule, avec ses propres attributions, celles du maire, du sous-préfet et du juge de paix. La constitution communale lombarde est peut-être la plus libérale de l’Europe ; mais l’exécution de la loi est si imparfaite, que le commissaire se trouve investi d’un pouvoir dictatorial tel que l’exercent en Turquie les cadis. Ces commissaires, dont les appointemens sont des plus modiques, sont choisis d’ordinaire dans la dernière classe des employés de la police, et se livrent sans scrupule à l’espionnage, pour peu qu’il soit lucratif. Le premier acte de la police révolutionnaire de Milan devait être la destitution de tous ces fonctionnaires et peut-être l’abolition même de cette charge. Loin de là, pas un des anciens commissaires ne fut destitué. Cette fausse clémence porta bientôt ses fruits. Les campagnes furent inondées de misérables auxquels les Autrichiens avaient ouvert les portes du bagne de Mantoue, et de prétendus déserteurs des troupes autrichiennes. Dans plusieurs chefs-lieux de district, le commissaire se composa une petite garde prétorienne de ces individus et des mauvais sujets du village. C’est par ce moyen que les Autrichiens étaient tenus au courant de tous nos mouvemens, tandis que nous ignorions ce qu’il nous importait de savoir. C’est à la faveur de cette conspiration permanente, tolérée par le gouvernement, que les vivres ou autres objets destinés à l’armée piémontaise tombèrent plus d’une fois aux mains de l’ennemi, que plusieurs villages furent incendiés, que des cris de mort furent proférés contre les maîtres, et que la révolte pénétra quelquefois parmi nos paisibles paysans. La très grande majorité de la population des campagnes ne prenait aucune part à ces désordres, mais elle n’osait pas s’y opposer, car le refrain habituel du commissaire et de ses satellites était celui-ci : Radetsky reviendra bientôt ; gardez-vous d’en douter, ni lui, ni les siens ne seront jamais expulsés de ce pays, et, à son retour, justice sera faite de tous. Ceux qui lui seront demeurés fidèles auront pour leur part ce qui sera enlevé aux méchans. Ceux qui ont quelque chose à se reprocher seront cloués sur le battant de leur porte. Faites votre profit de ce que vous avez entendu. — Les malheureux paysans demeuraient