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avec quelque sécurité, lorsque, le dimanche de Pâques, il fut attaqué par le général prussien Wrangel et vingt-six mille Allemands. Les troupes danoises comptaient seulement onze mille hommes. Malgré cette surprise, qui s’explique peut-être par l’insoumission de Wrangel aux ordres patens du roi de Prusse, et malgré l’infériorité du nombre, les Danois soutinrent ce choc inattendu avec un courage impétueux et ne plièrent qu’après huit heures de combat. Ils avaient suivi l’instruction bien connue de Nelson à Trafalgar : chaque soldat avait fait son devoir.

Le Danemark fut toutefois obligé de reconnaître l’impossibilité où il se trouvait de repousser l’ennemi. Cependant, si sa position insulaire et maritime lui défendait de courir plus long-temps la chance des batailles rangées, elle lui permettait d’opposer avec avantage la tactique à la force. En restant sur la terre ferme, l’armée danoise était contrainte de se replier devant le général Wrangel du midi au nord du Schleswig, et de se retrancher dans le Jutland, où elle pouvait se trouver acculée. Peut-être les Prussiens eussent-ils été amenés ainsi de combats en combats à pénétrer dans le Jutland en conquérans. Ils devaient y entrer sans rencontrer d’obstacles, mais en divisant leurs forces. En effet, les Danois, se portant à l’est, passèrent sans difficulté dans l’île d’Als, qui est jetée à deux cents mètres de la côte orientale du Schleswig et séparée par le petit Belt de l’île plus vaste de Fionie, séparée elle-même de la Seeland, où est Copenhague, par le détroit du grand Belt. La Fionie domine le Jutland méridional, comme l’île d’Als domine le Schleswig. Une partie de l’armée passa de l’île d’Als en Fionie, pendant que Wrangel occupait le Jutland sans coup férir et le frappait pour tout exploit d’une contribution de 11 millions de francs. La facilité des communications maritimes mettait le général Hedemann en position de réunir toute son armée en peu d’heures, soit en Fionie pour opérer une descente en Jutland, soit dans l’île d’Als pour tomber sur le Schleswig, tandis que les forces de Wrangel se divisaient en deux corps placés à plusieurs jours de marche l’un de l’autre. Le général Hedemann, retranché dans une position très forte par son passage dans l’île d’Als et la Fionie, pouvait, soit attaquer les Prussiens en Jutland, soit les prendre par derrière en Schleswig, afin de les forcer ainsi à rétrograder. Après avoir, du côté de la Fionie, simulé une descente sur le Jutland, le général danois se replia soudainement sur l’île d’Als pour débarquer en Schleswig. L’armée était déjà lancée dans l’intention d’opérer une reconnaissance, lorsque arriva de Copenhague la nouvelle de l’évacuation du Jutland obtenue par l’influence diplomatique des puissances amies du Danemark ; les choses étaient trop avancées pour que l’on pût éviter un engagement. Les deux corps d’armée en vinrent aux mains (28 mai). L’action fut conduite avec vigueur et se termina heureusement