Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 1.djvu/52

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

la seconde ne jaugent que 17 tonneaux ; mais, comme la pêche d’hiver occupe un plus grand nombre de bateaux, il en résulte que son tonnage total moyen est supérieur à celui de la pêche d’été[1]. De 1843 à 1848, la pêche d’été a employé en moyenne 92 bâtimens jaugeant 2,289 tonneaux, et la pêche d’hiver 151 barques jaugeant 2,573 tonneaux. La première a occupé 866 marins et 137 mousses, la seconde 1,473 marins et 302 mousses.

Le rendement en nature de ces pêches, calculé sur une période de dix ans, de 1838 à 1848, présente les résultats suivans : la pêche d’été a donné pour moyenne annuelle 1,875,640 kilogrammes, et la pêche d’hiver 3,622,224 kilogrammes de harengs ; le total moyen est donc de 5,497,864 kilogrammes. Sur ces produits bruts, 3,154,060 kilogrammes ont été salés, paqués ou sauris : 2,343,804 kilogrammes ont été consommés à l’état frais, ou rejetés comme rebut. Le produit en argent a été pour la pêche d’été de 467,462 francs, pour la pêche d’hiver de 809,399 francs. Ainsi, pendant les dix années qui viennent de s’écouler, Boulogne a retiré en moyenne de ses pêcheries de harengs une somme de 1,276,861 francs.

Aujourd’hui plus que jamais on est porté à se demander comment se répartit cet argent, quelle est dans ce produit total la part faite à l’intelligence, au travail manuel, au capital. Les renseignemens transmis par M. Demarle sur la pêche de Boulogne, d’accord avec ce que nous avons vu pratiquer ailleurs, nous permettent de répondre à ces questions d’un intérêt si actuel, et de montrer comment ce formidable problème social s’est résolu ici d’un commun accord sous l’empire seul de circonstances favorables et d’une entière liberté. Le régime de cette industrie est celui de la participation ; nos socialistes modernes diraient le régime de l’association ou de la solidarité. Un capitaliste, autrefois désigné sous le nom d’hôte de pêche, aujourd’hui par celui d’écoreur, fait construire et gréer un bateau dont le prix moyen, d’ailleurs variable avec le tonnage, est de 10,000 francs. L’écoreur choisit un maître, marin et pêcheur expérimenté, qui d’ordinaire, possédant quelques avances, rembourse une partie des frais de construction et d’armement, et devient ainsi associé. Le maître forme à son gré l’équipage, composé ordinairement de douze matelots et de deux ou trois mousses[2]. L’association ainsi constituée ne se livre pas seulement à la pêche du hareng,

  1. Dans la plupart des nombres ci-joints, ainsi que dans ceux qui vont suivre, nous avons supprimé les fractions pour qu’on puisse suivre avec plus de facilité les résultats généraux.
  2. Ces chiffres, donnés par M. Demarle d’après les renseignemens fournis par les syndics de Boulogne, sont un peu plus forts que ceux auxquels conduit le calcul des élémens numériques cités plus haut ; mais, les relevés d’équipages ne portant que sur un très petit nombre d’années, nous avons cru devoir adopter les résultats ci-dessus.