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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 septembre 1849.


La raison politique et l’histoire veulent toutes deux que le chef suprême de l’église catholique soit en même temps un souverain temporel. C’est une indispensable garantie pour les intérêts spirituels dont il est l’arbitre, de lui savoir une place indépendante parmi les princes de la terre. Il ne suffit pas que le pape soit indépendant vis-à-vis du dehors, il faut encore qu’il le soit chez lui : le pape ne peut être ni sous la main d’une puissance extérieure, ni sous la pression d’une majorité parlementaire. Le pape, sans un état qui soit à lui, n’est plus qu’un préfet ecclésiastique au service de la puissance chez laquelle il résidera ; le pape, obligé de capituler avec les directions d’un premier ministre, de subir un cabinet ou de jouer aux coups d’état, le pape n’est plus qu’un roi constitutionnel avec les chances de l’emploi. Voilà le point de départ de tous nos jugemens dans l’affaire de Rome, et ce credo nous semble assez orthodoxe pour ne permettre à personne de supposer, ou que nous veuillions camper à perpétuité sur le patrimoine de saint Pierre, ou que nous engagions Pie IX à reprendre la constituante de M. Mazzini. Nous lui demandons, au contraire, de venir régner chez lui en toute liberté pour donner à nos soldats le droit de s’en retourner chez eux ; mais nous lui demandons aussi de renoncer, dans sa prudence et dans sa charité, au regrettable avantage qu’il trouverait à nous mettre en trop mauvaise position, et nous le supplions de n’être point trop habile avec des gens qui le sont si peu.

La situation ne laisse pas, en effet, d’être bien singulière. La république française est devenue par substitution la fille aînée de l’église, et elle a rempli les devoirs que lui imposait ce titre héréditaire avec un zèle que la monarchie aurait peut-être calculé davantage. Son argent et son sang, elle n’a rien ménagé. La démagogie européenne avait chassé le pape de la ville éternelle. La France y est rentrée d’assaut ; le pape ne l’a point avertie qu’elle pût ainsi lui