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mieux le fixer à l’avenir. » L’assemblée, en effet, fit acte de gouvernement, mais ce fut pour déclarer d’une manière plus solennelle que le pouvoir exécutif ne lui appartenait pas. Après le rapport des commissaires envoyés à Mayence, et malgré tous les efforts de la gauche, l’assemblée adopta un ordre du jour parfaitement motivé, qui ne laissait pas de doute sur ses intentions. De ce vote résultaient trois conséquences également graves : d’abord, l’assemblée se déclarait pouvoir législatif et proclamait que l’autorité exécutive n’était pas dans ses mains ; en second lieu, elle accordait son appui aux gouvernemens affaiblis par la révolution ; troisièmement enfin, les insurgés de Mayence étant l’avant-garde des factions, l’assemblée, par un vote indirect, repoussait la république et affermissait la monarchie constitutionnelle.


II

Ce ne fut pas dans un débat accessoire et par voie d’allusion, ce fut directement, à la clarté du soleil et sur le champ de bataille le plus propice qu’on fut amené bientôt à décider cette question capitale : la monarchie ou la république. Les deux discussions que je viens de résumer remplirent toute la fin du mois de mai ; dès les premiers jours de juin, l’assemblée eut une tâche plus difficile à accomplir ; il s’agissait de consacrer par avance l’unité de la patrie, il fallait créer l’autorité centrale.

Déjà, depuis la réunion du parlement, ce grand problème préoccupait tous les esprits sérieux. Il importait d’organiser au plus tôt le pouvoir qui représenterait l’unité dans le gouvernement de l’Allemagne. L’ancienne diète était, pour ainsi dire, annihilée, et ses membres n’étaient plus, selon l’expression de M. Venedey, que les gens d’affaires de l’assemblée nationale. Fallait-il donc que cette assemblée elle-même, héritant de la diète, remplaçât le pouvoir qu’elle venait de renverser ? Tel était sans doute le vœu de la démagogie, et c’est précisément pour écarter, dès le début, toutes ces folles prétentions révolutionnaires, qu’il était urgent d’installer sans délai le gouvernement central. Une commission de quinze membres fut nommée le 3 juin ; la gauche n’avait pu y introduire que deux de ses membres, MM. Robert Blum et Trüschler. Pendant le travail de cette commission, l’opinion publique travaillait aussi, et les projets, les systèmes, les théories les plus opposées, se succédaient sans relâche. Je ne parle pas des points principaux sur lesquels les partis ne pouvaient varier ; d’un côté était le système républicain, qui prétendait transformer I’assemblée en une convention souveraine et investir son président de la puissance absolue ; de l’autre était l’opinion vraiment sage et politique, la seule opinion sérieuse, celle qui voulait un pouvoir exécutif distinct de l’assemblée nationale.