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prétentions des systèmes. Les Allemands adorent d’une façon abstraite je ne sais quelle unité impossible, et à chaque instant l’esprit local, l’esprit de race et d’antagonisme éclate malgré eux dans leurs discours. M. Dahlmann s’opposa énergiquement à toute modification des articles II et III ; « la répartition des voix, disait-il, a été étudiée soin ; elle forme un ensemble dont toutes les parties s’enchaînent il est impossible de détacher une seule pierre de l’édifice sans le ruiner tout entier. » Cette considération, présentée avec une autorité dogmatique, fit disparaître les ambitions provinciales ; le système de l’unité imposa silence aux vieilles rancunes, et le projet de la commission fut adopté par une majorité considérable.

L’article IV du même chapitre (§§ 12,13, 14) établit qu’une rémunération est due aux députés ; les députés du Staatenhaus seront rétribués par les états qui les envoient, les députés du Volkshaus seront payés par le trésor de l’empire. Aucun député ne pourra accepter de mandat impératif, ni faire partie des deux chambres à la fois. L’article V (§§ 15, 16, 17, 18, 19) statue sur les conditions du vote, sur le nombre exigé de députés présens, sur les différentes sortes de majorité selon la nature ou l’importance des lois. Il décide que la loi a besoin de l’assentiment des deux chambres ; il refuse enfin le veto absolu au gouvernement de l’empire et ne lui accorde que le veto suspensif. Cette discussion du veto fut très vive. M. de Vincke ne manquait pas de bonnes raisons quand il demandait pour le gouvernement central une autorité plus forte, un moyen de ne pas être annihilé par les chambres. Dans l’intérêt même de cette unité tant désirée, ne devait-on pas songer à la triste situation du pouvoir impérial ? Ne serait-il pas obligé peut-être de résister, dans la chambre haute aux prétentions des états particuliers, dans la chambre du peuple aux empiétemens démagogiques ? Les coalitions de deux partis contre un ennemi commun sont-elles rares dans l’histoire parlementaire, et si les deux chambres, quoique représentant des intérêts bien opposés, s’unissaient pour la ruine du gouvernement central, devait-on le désarmer d’avance et le livrer à leurs coups ? M. Welker n’aperçoit pas ce danger ; M. Mittermaier rappelle les malheurs que le veto absolu attira sur Louis XVI, et la fausse application qu’il fait de ce sinistre exemple prouve qu’il confond deux situations tout-à-fait dissemblables. Louis XVI n’avait pas à créer l’unité de la France ; quand la France accomplit ce travail sur elle-même, le pouvoir central, je veux dire la royauté, avait mieux que le veto absolu, elle avait une autorité sans contrôle ; Louis XI, Richelieu, Louis XIV, n’étaient pas désarmés, ce me semble, en face de la Bourgogne et de la Bretagne, en face des intrigues aristocratiques et des fantaisies de la fronde. Mais non, l’histoire n’est rien pour les législateurs de Saint-Paul ; l’Allemagne se transformera subitement sans avoir à traverser toutes les phases que les lois de la logique ont