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de Toscane et de Cracovie, duc de Lorraine, duc de Salzbourg, de Styrie de Carinthie, d’Ukraine et de Bukovine, grand-prince des Sept-Montagnes, margrave de Moravie, duc de la Haute et basse Silésie, duc de Modène, de Parme, de Plaisance et de Guastalla, duc d’Auschwitz, de Zator, de Frioul, de Raguse, de Zara, comte princier de Habsbourg, de Tyrol, de Kybourg, de Goritz et de Gradiska, prince de Brixen, margrave de la haute et basse Lusace, margrave d’Istrie, comte d’Hohenembs, de Feldkirch, de Bregenz, de Sonnenberg, seigneur de Trieste et de Cattaro, etc., etc. Tout cela, sans doute, ne l’empêchait pas d’être roi constitutionnel ; il semble cependant que l’éclat des temps féodaux fût bien autrement visible dans cette vieille monarchie que le caractère tout récent de l’esprit moderne. Cet esprit au contraire, malgré les répugnances personnelles de Frédéric-Guillaume IV, était clairement empreint dans l’histoire et la conduite de la monarchie prussienne. Le jour même où Ferdinand Ier et son jeune successeur se parent ainsi de toutes leurs splendeurs du moyen-âge, le petit-neveu du grand Frédéric donne à la Prusse la constitution la plus libérale que puisse souhaiter le génie des temps nouveaux. Ce rapprochement n’est-il pas le symbole expressif de l’Allemagne ? N’y voit-on pas manifestement les deux oppositions qui la divisent, le nord et le midi, le catholicisme et le protestantisme, les souvenirs du passé et les espérances de l’avenir ? À chaque pas que l’on fait ou que l’on croit faire vers cette impossible unité, l’invincible antagonisme se redresse, et le mensonge des systèmes s’évanouit.

Enfin la discussion du programme de M. de Gagern commença le 11 janvier. Une tristesse profonde remplissait les esprits. Quelle que fût, en effet, l’issue de la lutte, il devait en résulter une humiliation cruelle pour les plus sages intelligences du parlement. Ou bien l’Autriche serait exclue de la confédération, ou bien l’homme le plus éminent de l’assemblée, le vrai chef du parti libéral, M. de Gagern, allait subir une éclatante défaite, qui, pour long-temps peut-être, ruinerait son influence. La lutte s’annonça vivement. Parmi les différentes propositions remises au président, je remarque celle de M. de Lasaulx ; elle indique le ton de la controverse et les dispositions des esprits : « Considérant qu’il ne convient pas à des hommes sages de suivre le chemin des fous, l’assemblée nationale engage le ministère à préparer l’unité de la patrie de concert avec toutes les souverainetés de l’Allemagne, et particulièrement avec la première de toutes, avec la monarchie autrichienne » Les députés de la gauchie persistent dans un ordre du jour qui écarte le programme sans discussion. Il fallut cependant discuter ; M. de Gagern, appelé à la tribune par le rapporteur de la commission, exposa ses plans avec un talent de parole, avec une variété d’argumens qui causèrent une impression profonde. M. de Vincke voulut lui prêter le secours de sa redoutable ironie ; mais en