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La nature, l’organisation et la procédure des assemblées de révision méritent d’être examinées à fond, avec plus de détail et plus de loisir que n’en comporte une chronique. Nous avons seulement voulu, puisque nous signalions le malaise que ressent tout le monde et les causes de ce malaise, c’est-à-dire la brièveté légale du gouvernement, nous avons voulu indiquer aussi les remède qui sont à notre portée ; nous avons voulu montrer qu’il n’est pas nécessaire de chercher dans les aventures ce que nous pouvons trouver dans une révision bien faite, bien menée et bien soutenue.

Cette répugnance qu’éprouve le pays, à peine sorti d’une révolution, à risquer une nouvelle aventure, dût-elle même nous assurer le repos que nous voulons tous, cette crainte du mieux, s’il faut payer le mieux à venir avec le bien présent, est un sentiment qui se mêle d’une façon singulière au sentiment de malaise que nous signalions tout à l’heure. Le pays est inquiet de l’avenir, inquiet surtout de l’instabilité du présent. Eh bien ! alors faisons quelque chose pour consolider le présent. — Oh ! prenez garde ! si par hasard vous alliez risquer ce que nous avons. Voilà dans quelle naturelle et inévitable contradiction flotte l’esprit public ; voilà ce qui fait et ce qui fera que tous les quinze jours on parlera de coups d’état, et beaucoup entendent le mot d’une oreille favorable. À quand donc le coup d’états ? — À demain. — À demain ! Imprudens ! remettons à quinzaine. Dans quinze jours, j’aurai plus de décision. — Non ; dans quinze jours, le pays n’aura pas plus de décision, et nous ajoutons qu’il n’a pas besoin d’en avoir plus ; car où le remède légal, la révision, suffit, à quoi bon le remède illégal et périlleux ?

Nous remarquions dernièrement combien le président de la république avait le don de sentir l’opinion publique et de s’y associer. Nous trouvons un nouvel exemple de cette heureuse conformité dans sa réponse au discours du maire de Ham. Quelques personnes se demandaient ce que le président allait faire à Ham, et s’il n’y avait pas un peu d’orgueil de sa part à visiter, comme président de la république, ces lieux où il avait été six ans prisonnier. Sa réponse au maître de Ham a expliqué en quelque sorte le but de son voyage, et nous serions tentés de croire, après l’avoir lue, que le président allait à Ham pour enterrer une bonne fois le souvenir de ses entreprises de Strasbourg et de Boulogne dans un noble et solennel désaveu. Il a parlé avec une généreuse franchise de sa témérité, du tort qu’il avait eu d’attaquer un gouvernement régulier, et de ses six ans de captivité, qui étaient une expiation méritée Que pourront maintenant dire de plus les ennemis du président ? Quel hommage plus expressif rendit à l’ordre que cette confession faite de si bonne grace, et quel hommage plus conforme aux sentimens du pays ! Quel toast délicat et politique porté à ceux qui gardent leurs convictions et leurs affections, mais qui gardent aussi inviolablement le respect de la loi ! Ce toast porté par quelqu’un qui s’accuse en même temps de ne pas avoir gardé ce respect de la loi, et qui s’en accuse dans le lieu même où il en a été puni, est le plus habile et le plus heureux langage d’un pouvoir établi, quand ce pouvoir établi est un ancien prétendant, entouré d’anciens adversaires, résolus à maintenir le présent sans renier le passé.

Avant d’arriver à la discussion de la loi sur la presse, qui a été, dans cette quinzaine, la grande affaire de l’assemblée, énumérons brièvement quelques-