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Le télégraphe proprement dit, ou la partie de la machine qui forme les signaux, se compose de trois branches mobiles : une branche principale de quatre mètres de long, appelée régulateur, et deux petites branches longues d’un mètre, appelées indicateurs ou ailes. Le régulateur est fixé par son milieu à un mât qui s’élève au-dessus du toit de la maisonnette où se trouve placé le stationnaire. Ces branches mobiles sont disposées en forme de persienne, c’est-à-dire composées d’un cadre étroit, dont l’intervalle est rempli par des lames minces, inclinées les unes au-dessus des autres. Cette disposition a l’avantage de donner aux pièces une grande légèreté ; elle leur permet aussi de résister aux vents et de combattre les mauvais effets de la lumière. On peint en noir les branches, afin qu’elles se détachent avec plus de vigueur sur le fond du ciel. L’assemblage de ces trois pièces forme un système unique, élevé dans l’espace et soutenu par un seul point d’appui, l’extrémité du mât, autour duquel il peut librement tourner. Les pièces du télégraphe se meuvent à l’aide de cordes en laiton. Ces cordes communiquent, dans la maisonnette, avec les branches d’un autre télégraphe, qui est la reproduction en petit du télégraphe extérieur. C’est ce second appareil que le guetteur manœuvre ; le télégraphe placé au-dessus du toit ne fait que répéter les mouvemens imprimés directement à la machine intérieure.

Le régulateur est susceptible de prendre quatre positions : verticale, — horizontale, — oblique de droite à gauche, — oblique de gauche à droite. Les ailes peuvent former avec lui des angles droits, aigus ou obus. Ces signaux sont clairs, faciles à apercevoir, faciles à écrire ; il est impossible de les confondre.

Voici maintenant les conventions et les principes qui règlent la formation des signaux. Les frères Chappe ont décidé qu’aucun signal ne serait formé sur le régulateur place dans la situation verticale ou perpendiculaire. Les signaux ne sont valables que quand ils sont formés sur le régulateur placé obliquement. Ils ont encore décidé qu’aucun signal n’aurait de valeur et ne devrait, par conséquent, être écrit et répété que lorsque, étant formé sur une des deux obliques, il serait transporté tout formé soit à l’horizontale, soit à la verticale. Ainsi, le guetteur qui voit former le signal le remarque pour se préparer à le répéter, mais il ne l’écrit point ; aussitôt qu’il le voit porter à l’horizontale ou à la verticale, il est certain que le signal est bon, alors il le répète et le note. On appelle cette manœuvre assurer un signal. Cette manière d’opérer a pour but de bien marquer au stationnaire quel est, au milieu de tous les mouvemens successifs des pièces du télégraphe, le signal définitif auquel il doit s’arrêter pour le reproduire.

Les diverses positions que peuvent prendre le régulateur et les ailes donnent quarante-neuf signaux différens ; mais chaque signal peut prendre une valeur double, selon qu’il est transporté à l’horizontale ou à la verticale : ainsi, quarante-neuf signaux peuvent recevoir quatre-vingt-dix-huit significations, en partant de l’oblique de droite, pour être affichés horizontalement ou verticalement, et de même pour l’oblique de gauche ; en tout cent quatre vingt seize signaux. Les frères Chappe ont arrêté que la moitié de ces cent quatre vingt seize signaux serait consacrée au service des dépêches, et l’autre moitié à la police de la ligne, c’est-à-dire aux avis et indications à donner aux stationnaires. Les quatre-vingt dix huit signaux formés sur l’oblique de droite servent à la composition des dépoches, les quatre-vingt-dix-huit signaux formés sur l’oblique de gauche sont destinés au règlement de la ligne.