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REVUE DES DEUX MONDES.

comme l’ont fait quelques compagnies accusées alors de timidité ? Que sont devenues ces compagnies de Bordeaux à Cette, d’Avignon à Lyon, avortés avant un travail quelconque, abandonnant leur cautionnement plutôt que de s’exposer à de plus grandes et imminentes pertes ? Croit-on que quelques millions entrés par cette triste voie dans les coffres de l’état y aient apporté un bénéfice réel ? Mais, sans remonter à ces pénibles souvenirs, cherchons où en sont aujourd’hui les meilleures, les plus fructueuses entreprises ? Nous le voyons, il n’y en a pas une dont les titres d’emprunt ne soient de beaucoup au-dessous du pair de 1,000 francs. Cependant ces titres rapportent 50 francs d’intérêts ; cependant ces intérêts, fidèlement servis, sont toujours payés avant qu’un bénéfice quelconque soit distribué aux actionnaires.

Il y a donc nécessité et opportunité de relever le crédit des chemins de fer, si l’on veut y ramener la confiance et les capitaux. Maintenant que l’on examine froidement, avec soin et maturité les conséquences financières des mesures que nous proposons, et l’on reconnaîtra que, si elles imposent sur des dépenses effectuées des sacrifices considérables, elles ne grèvent le présent et l’avenir que de diminutions de recettes annuelles peu importantes, ou d’éventualités de dépenses annuelles aussi, qui assurément sont loin d’égaler les sommes que l’état consacrerait à la construction et à l’exploitation des lignes encore à exécuter.

De l’exploitation, nous n’avons dit qu’un mot, mais ce mot exprime toute notre pensée. Croit-on que sur un territoire aussi étendu que le nôtre au milieu de cette multitude d’intérêts divers, compliqués, rivaux, l’état puisse se faire utilement messagiste et entrepreneur de roulage ? Cela est-il possible ? Le sens commun peut-il l’admettre ? Une commission de l’assemblée s’est chargée de la réponse dans le rapport qu’elle a déposé le 27 juillet dernier ; nous n’oserions pas en dire autant qu’elle, et nous le dirions avec moins d’autorité.

En résumé, nous avons l’espoir qu’à l’aide de bonnes combinaisons, les capitaux étrangers peuvent être rappelés dans nos entreprises, et nous fondons notre opinion sur la constance de ces capitaux à demeurer dans les anciennes lignes. Ils y sont, en effet, plus nombreux encore aujourd’hui qu’ils ne l’étaient au point de départ, après 1840. Nous appelons l’attention sur ce fait remarquable, il est d’une vérité arithmétique. C’est en ne désespérant pas de l’avenir et en rassurant loyalement ceux qu’elle conviait à y croire, que l’administration française, sous des ministres habiles tels que les Corvetto et les Louis, a fondé son crédit. Que le gouvernement suive aujourd’hui la même marche, nous en obtiendrons le même résultat. L’esprit d’association ranimé, encouragé, fera renaître la confiance et le travail ; il paiera ainsi promptement sa dette de reconnaissance à la société tout entière.

C. L.


THÉÂTRES LYRIQUES.

La formule si connue : L’art est l’expression de la société, n’a jamais paru plus vraie que de nos jours. Soit qu’on visite l’exposition de peinture, soit qu’on fréquente les théâtres ou qu’on examine les rares productions qui s’adressent encore au goût et à l’intelligence, on trouve partout la triste image