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à cette race malheureuse sa popularité romanesque. Suivant eux si le nom des Stuarts vibre encore sur l’ame des Anglais, il faut l’attribuer à l’influence de deux grands écrivains, Hume et Walter Scott. Tous deux Écossais, ils auraient cherché, dit-on, à satisfaire une sorte d’amour-propre et de patriotisme local en protégeant de leur génie la dynastie que l’Écosse avait donnée à l’Angleterre. Un historien un romancier auraient égaré ainsi l’opinion des générations modernes. On se flatte que le succès populaire du livre de M. Macaulay rompra le charme et dissipera l’erreur. On se trompe ; M. Macaulay s’est lui-même trompé en ce point. Les Stuarts ont eu tous les défauts et ont commis toutes les fautes qu’on leur reproche. N’importe, ils furent victimes de la destinée bien plus que de leurs erreurs ou de leurs vices ; leur chute fut plus grande que leur responsabilité : ils paraîtront toujours plus intéressans que coupables.

Non, Ils ne furent point coupables ; ils ne firent que soutenir le rôle que le passé et le présent, devant les voiles de l’avenir, inspiraient à la royauté. Nous venons de passer en revue les forces du pouvoir royal et des libertés populaires au commencement du XVIIe siècle. On a vu que des deux côtés les prétentions rivales avaient des fondemens égaux dans les traditions nationales et dans les idées religieuses. Du reste, à ces prétentions, pas de limites précises posées par des lois solennelles ou des coutumes constantes ; point de contrat semblable à nos chartes et à nos constitutions modernes. Les précédens favorisaient les deux causes et n’avaient point acquis cette autorité uniforme que leur a donnée aujourd’hui une expérience de cent soixante années. Qu’on se représente donc les sentimens et les idées qui devaient remplir l’ame d’un prince fier, généreux, religieux, chevaleresque, artiste comme Charles Ier, lorsqu’il monta sur le trône. L’Europe voyait alors s’accomplir la révolution qui concentrait partout la suprême puissance aux mains de la royauté. En Espagne, la victoire de l’absolutisme s’était consommée sous Philippe II. En Allemagne, la maison d’Autriche écrasait la résistance politique et religieuse dans la personne du propre beau-frère de Charles Ier, l’électeur palatin, roi fantastique de Bohème. En France, Richelieu anéantissait les rébellions féodales et protestantes. Une nouvelle ère commençait pour la civilisation. Avoir la plénitude du pouvoir royal, c’était pour Charles Ier être l’égal en puissance des souverains revêtus du même caractère, décorés du même titre que lui ; c’était le droit d’illustrer sa couronne et son nom dans les grandes affaires de l’Europe, sans avoir besoin de liarder avec un parlement tracassier des subsides et des soldats ; c’était la force de faire triompher ce qu’il considérait comme la vérité religieuse sur des doctrines également contraires à l’autorité dans l’église et dans l’état ; c’était le moyen de s’entourer d’une cour brillante et polie, de répandre