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Les principes ainsi établis, notre première pensée était de nous renfermer dans l’examen financier des huit années que M. le ministre des finances a choisies pour justifier ses reproches ; mais un mot nous inquiète dans la phrase que nous avons reproduite. M. le ministre parle de ces huit années seulement ; est-ce qu’il entend faire grace des autres ? en portant une accusation grave, est-ce qu’il en sous-entend une plus grave encore ? Si c’est une concession, il n’est pas nécessaire de l’accepter ; si c’est une insinuation, il est nécessaire de la combattre. Écartons donc tous ces artifices ; reprenons rapidement, dès son premier jour, l’histoire financière de la monarchie de 1830 ; disons simplement ce qu’elle a coûté et ce qu’elle a fait, afin que l’opinion publique lui assigne équitablement sa place parmi les gouvernemens de la France.

Les bons ou les mauvais gouvernemens laissent surtout des traces de leur passage dans le tarif des contributions et dans le grand-livre de la dette publique. Un gouvernement qui obère son pas croit doubler ses ressources en doublant les impôts qui les produisent, et il n’aboutit en réalité qu’à cumuler la gêne du trésor avec celle des contribuables. Un gouvernement qui obère son pays emprunte sous toutes les formes et pour toutes sortes de dépenses ; il épuise les ressources présentes, il anticipe sur les ressources futures, et, malgré tous ces sacrifices, il ne traverse une crise difficile que pour arriver à une crise plus difficile encore. Les bons gouvernemens se reconnaissent à une conduite opposée : ils n’empruntent que pour des nécessités suprêmes et passagères, ou pour des dépenses fécondes, et ils assurent, sur leurs recettes ordinaires, le service des intérêts et l’amortissement de leurs emprunts. Ils attendent l’élévation de ces recettes non de l’élévation des tarifs d’impôts, mais de leur plus fréquente application, et les accroissemens de leurs revenus, prélevés sur l’accroissement de l’aisance générale, se résolvent en emplois utiles qui font couler avec plus d’abondance la source où ils ont été puisés.

N’est-ce pas l’histoire financière du gouvernement de juillet que nous venons de résumer en quelques lignes ? On a souvent parlé de l’augmentation des impôts : les impôts se divisent en deux grandes catégories, — ceux qui atteignent directement la propriété, le champ, la maison, l’industrie, et qui pèsent sur le propriétaire, le locataire, le patentable, quelles que soient d’ailleurs les circonstances qui en allégent ou en aggravent pour lui le fardeau : ce sont les contributions directes ; elles sont fixes de leur nature et ne peuvent s’accroître que par le rehaussement de l’impôt ou par la création de nouvelles propriétés et de nouveaux contribuables. — Les contributions indirectes n’atteignent pas immédiatement ceux qui les acquittent ; elles frappent les denrées et les marchandises ; elles deviennent portion intégrante de leur prix et se proportionnent à l’étendue de la consommation, et,