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microscope. — Ne pourriez-vous faire des mailles plus petites ? Ceci a l’air d’un filet à prendre du poisson.

La Marquise, sans lever les yeux.

Comme ce n’est point pour vous que je travaille, je me passerai de votre approbation. Et puis je ne tricote point de bas, mon cher monsieur ; j’ai déjà eu l’honneur de vous dire que c’était une cravate.

Le Marquis.

Ah ! si c’est une cravate, c’est différent.

La Marquise.

Il est certain qu’une cravate n’est pas la même chose qu’une paire de bas… Je vous ferai observer, marquis, que c’est mon peloton que vous vous amusez à faire rouler sous votre botte si joliment.

Le Marquis.

Ah ! pardon.

La Marquise.

Si vous n’y tenez pas trop, voulez-vous avoir l’obligeance de me le rendre.

Le Marquis.

Soyez tranquille ; je n’y toucherai plus.

La Marquise.

Sérieusement, refusez-vous de me le ramasser ?

Le Marquis.

Pas du tout ; quelle plaisanterie ! Je croyais que vous aviez coutume de le laisser sur le tapis.

La Marquise.

C’est une erreur des plus graves. À propos, quel homme est-ce que votre seigneur étranger, autrement dit le cacique ?

Le Marquis.

Je ne sais ; il n’est pas venu.

La Marquise.

Ah ! voilà tous vos frais de toilette perdus : comme je vous connais, vous devez être passablement contrarié.

Le Marquis.

Est-ce une façon de m’apprendre que vous me trouvez maussade ?

La Marquise.

Je vous trouve charmant, au contraire. Ainsi vous voyez : vous pouviez jouer toute la nuit à votre cercle, et vous venez passer votre soirée près de votre femme… Un bienfait n’est jamais perdu avec moi, marquis, et, en échange de votre sacrifice, je vais vous apprendre une bonne nouvelle.

Le Marquis.

Ah ! quoi donc ?