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elle n’avait pas eu l’honneur de la commencer, elle n’eut pas celui de la finir.

Une pensée grande et simple présida aux premiers travaux publics de la monarchie de 1830 : elle voulut achever. Elle se porta l’héritière de toutes les époques de notre histoire. Les canaux de la restauration, les routes de l’ancienne monarchie, la vieille basilique de Saint-Denis, le Panthéon moderne, l’Arc-de-Triomphe et l’église de la Madeleine destinés aux pompes militaires et aux pompes religieuses de notre gloire, le palais d’Orsay, le Muséum des sciences naturelles et l’École des Beaux-Arts, tous ces monumens, tous ces travaux entrepris pour l’utilité, pour la grandeur ou pour l’ornement de la France, et interrompus par un puissance ou par caprice, furent repris avec persévérance, et associèrent par leur achèvement l’époque présente à tout le passé de notre histoire. Ce ne fut pas seulement un heureux démenti donné à notre proverbiale inconstance, une intention politique dirigeait cette œuvre des beaux-arts : c’était toujours le système qui voulait réunir toutes les traditions et tous les intérêts de la France.

Aux entreprises terminées succèdent bientôt des entreprises nouvelles : les palais législatifs répondent à leur grande destination, la fondation de l’abbé de l’Espée trouve un établissement digne d’elle, l’hospice de Charenton cesse d’affliger l’humanité. Les grands services publics s’installent dans de nouveaux édifices ou dans leurs anciens édifices agrandis. Une restauration ingénieuse répare les ruines de nos cathédrales et leur restitue leur solidité première, sans leur ôter les caractères de leur vénérable antiquité ; rajeunie de six siècles par une main savante, la Sainte-Chapelle redevient la chapelle de saint-Louis. Les anciens canaux livrés au commerce aboutissaient à des rivières d’un régime difficile et incertain : l’art qui avait créé les canaux perfectionne les rivières. De grandes lignes manquaient au réseau de nos voies navigables, l’une complétant la jonction des deux mers et réalisant enfin la pensée de Riquet et de Vauban, l’autre, pour emprunter l’expression pittoresque d’un ingénieur, détournant un bras du Rhin à Strasbourg et l’amenant à Paris : ces deux grandes lignes sont entreprises. Les routes stratégiques de l’ouest viennent en aide à la civilisation plus encore qu’à la surveillance de ce pays de guerre civile : elles pacifient la Vendée en l’enrichissant. Nos petits ports sont améliorés et multiplient sur nos côtes les points de refuge devenus insuffisans par le progrès de notre commerce, nos grands ports sont agrandis, et la science construit les phares qui doivent en éclairer la route. De féconds encouragemens sont donnés aux premières entreprises de chemins de fer. Les travaux défensifs de la guerre ne sont pas plus négligés que les travaux reproductifs de la paix : nous relevons les remparts de nos places fortes, et nous remplissons nos arsenaux.