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afin d’être en mesure de tenir tête au gros de l’armée ennemie. Trois heures s’étaient à peine écoules depuis la conférence du vieux général avec Georgey, que le bruit du canon annonça que la bataille s’engageait sur Kapolna. Dembinski se précipita de ce côté avec Georgey. Arrivés sur le terrain, ils trouvèrent l’armée en désordre, l’infanterie et même, des hussards en pleine fuite, immédiatement Georgey fit tourner sa voiture, et engagea Dembinski à l’imiter. Dembinski répondit que la bataille avait été engagée contre son vœu, mais qu’il en devait porter la responsabilité et qu’il ne reculerait point. Il monta à cheval et s’avança au galop sur Kapolna. Le soir approchait ; Dembinski n’avait que le choix, ou d’exécuter une retraite vers les divisions de son armée qui ne s’étaient pas encore trouvées en ligne, ou de garder résolûment sa position. De ces alternatives, il eût choisi la première, s’il avait eu des troupes plus aguerries. Le danger d’une retraite en face de l’ennemi avec des, troupes peu sûres le décida à tenir devant Kapolna. Dans la nuit, le général se multiplia et donna de nouvelles instructions à Georgey, à Klapka, à Guyon, à Aulich. Il essaya de leur inspirer un peu de la confiance qui l’animait encore.

La bataille s’engagea en grand le 27 au matin. On attribue au général Dembinski ces paroles peu flatteuses pour les officiers qui commandaient sous ses ordres : « La troupe qui occupait le village de Kapolna, aurait-il dit, ne fit point son devoir. Ma présence et mon exemple, tous les efforts de mes aides-de-camp ne purent arrêter sa fuite, et ce n’est que grace au mouvement exécuté par le colonel Aulich sur la droite de l’ennemi, que les progrès de l’artillerie autrichienne purent être arrêtés. J’en profitai pour haranguer le bataillon Zanini et le lancer, sous les ordres du brave colonel Psotta, à la reprise du village de Kapolna ; mais, à peine arrivé aux premières maisons, le bataillon tout entier abandonna son drapeau et passa à l’ennemi si subitement, qu’un seul officier et le chapelain purent échapper à l’entrain de ce mouvement. » Dembinski comptait encore ressaisir une position favorable par une marche commandée au brave Guyon ; eorgey prit sur lui de donner un ordre opposé a une division qui devait appuyer Guyon, et le fruit de cette manœuvre, qui devait déplacer le champ de bataille au profit des Magyars, fut entièrement perdu. Cependant Georgey se tenait à cinq portées de canon, sous prétexte de protéger la retraite de l’armée. C’est ce qui a fait dire au général Dembinski que Georgey voyait toujours l’ennemi là où il n’était pas, et ne le voyait jamais là où il était.

Le 28, il fallut se résoudre à la retraite.. Les ordres furent donnés pour un mouvement sur Metzo-Kœrs L’armée manquait de tout ; on ne lui avait pas distribué de pain depuis deux jours ; elle n’avait ni paille ni bois à brûler. Le général en chef crut avoir assez fait pour l’honneur