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éveiller le zèle, en ce moment fort somnolent, des chefs d’industrie et des classes aisées en général en faveur des caisses de secours, ou qu’il l’eût engagé à délibérer sur le mode de surveillance qui pourrait être appliqué aux caisses de retraite spéciales : une discussion circonscrite dans ce cercle aurait pu fournir les élémens de deux lois complémentaires de celles qui paraissent devoir être prochainement votées par l’assemblée, et qui sont bonnes. On n’a fait rien de pareil.

Poursuivons l’énumération. Était-ce bien la question de l’assiette du droit sur le bétail étranger qu’il y avait à traduire devant le conseil général ? Je croirais que non. L’administration s’est bornée à demander s’il convenait que le droit par tête fût remplacé par un droit au poids. La question est résolue depuis long-temps pour les gens de bon sens. Voilà quinze ans qu’on la discute, et il y a plusieurs années que les villes ont ce nouveau mode de perception. Envers l’étranger, un traité l’a mis en activité depuis quatre ans sur une de nos frontières, celle du piémont. À moins de supposer que le conseil général, dans sa session d’un mois, aurait du temps à perdre, il ne fallait donc pas le provoquer à en délibérer. Il y avait une bien autre question à poser au conseil général à l’occasion de cette rareté de la viande que l’administration signale et déplore sans prendre de parti.

Que dire d’un flot de propositions subalternes qui sont les unes du pur détail administratif, les autres de nature à être tranchées en un clin d’œil par le chef de bureau du tarif, comme celle de savoir si les soies grèges ou moulinées que produit notre sol devront continuer de supporter, par une exception presque unique au milieu de toutes nos productions, la rigueur d’un droit de sortie ? Le droit sur les soies à la sortie est, dans notre législation douanière, une anomalie sans motif, une injustice sans excuse.

Dans la série des questions déférées au conseil général, on en peut remarquer une qui était incontestablement de sa compétence, et qui d’ailleurs, par ses proportions, était digne de l’occuper, celle de la durée de la journée des ouvriers, à laquelle on a rattaché celle du travail des dimanches. Sans contredit, en termes généraux, c’est une affaire d’intérêt populaire. Jusqu’à quel point cependant était-il urgent de la faire discuter ? Ici il faut distinguer. Et d’abord pour les adultes. Les novateurs du gouvernement provisoire d’un trait de plume avaient fixé la journée à dix heures pour Paris et onze pour les départemens, comme si la force musculaire n’était pas la même ici et là. À cette fixation boiteuse le décret du 5 septembre 1848 a substitué la longueur uniforme de douze heures. C’est l’usage à peu près général, et ainsi le règlement actuel n’a rien d’offensif. Les ouvriers non plus que les patrons ne s’en montrent aucunement préoccupés. Ainsi rien ne pressait. Or, quand on réunit une assemblée pour un mois, il ne faut lui