Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 6.djvu/351

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

entreprises coloniales. Des colonies ne sont point des établissemens militaires. L’Angleterre et la Hollande, qui l’ont compris, font régir les leurs par des ministères spéciaux ; leurs colonies et leur navigation y gagnent également. Une semblable disposition serait facile à justifier chez nous, maintenant que l’Algérie a remplacé les Indes et le Canada, et que la nécessité d’ouvrir des émonctoires à la métropole oblige l’administration à considérer sous un nouveau point de vue les établissemens d’outre-mer. Partagées entre deux ministères, l’Algérie et les colonies y sont des accessoires qui souffrent du voisinage d’autres services. Réunies, elles formeraient un ensemble digne d’une sollicitude exclusive et susceptible d’une fécondité qu’on ne paraît pas soupçonner.

Le département de la marine ne perdrait rien à cette création, surtout si par un retour salutaire au système de Colbert on lui rendait la partie de ses attributions nécessaires qui est restée éparse dans les départemens des travaux publics, de la guerre, des finances et du commerce. Une étroite connexion s’établirait alors entre tous les intérêts, toutes les ressources maritimes du pays, et elle doublerait notre force tout en réduisant nos dépenses ; mais, sans aller si loin, l’administration n’accepte-t-elle pas une situation bizarre, lorsqu’elle attend les investigations d’une commission parlementaire en présence d’abus qu’il dépend d’elle de réformer, et lorsqu’elle peut introduire dans les services des vivres, de l’artillerie, des constructions par exemple, des améliorations et des économies également importantes en moins de temps qu’il n’en faudra à nos honorables représentans pour se mettre au fait de la moindre de ces difficultés ?

Dans l’intérieur du territoire, le travail appelle de tous côtés l’ouvrier, et, pour ne citer qu’un seul point, Lyon, cette seconde capitale de la France que Napoléon releva de ses ruines, et qui est devenue depuis vingt ans un foyer d’émeutes, Lyon a-t-il été l’objet d’une attention suffisante ? Le commissaire extraordinaire qui s’appelle l’état de siège y comprime un amas de matières incandescentes toujours près de faire explosion ; mais, pour les disperser et les éteindre, il reste à prendre des mesures efficaces, et la durée des soins qu’exige un mal qui vient de loin est une raison de plus de mettre la main à l’œuvre sans perte de temps.

À défaut d’autres indications utiles, l’administration en trouverait plus d’une dans les œuvres du prince Louis-Napoléon. De tous ses écrits, le traité de l’Extinction du paupérisme est, à juger par le soin qu’on a mis à le répandre, celui auquel ses amis ont attaché le plus de prix. Le paupérisme ! c’est en effet l’ulcère de notre époque : ce n’est pas la même chose que la pauvreté timide et laborieuse que nos aïeux ont plainte et soulagée ; il a trop souvent l’impudence, les besoins et les prétentions des vices dont il procède, et il a fallu un mot nouveau pour exprimer