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expédient révolutionnaire ; c’est la confiance par ordre, c’est l’arbitraire dans la mesure commune des valeurs, c’est le despotisme introduit dans ce qu’il y a de plus naturellement libre au monde, dans le régime des transactions. Il faut qu’une nation soit en guerre avec elle-même ou avec les autres peuples civilisés pour avoir le droit de faire cette violence aux lois essentielles du crédit et du commerce. Le cours forcé des billets de banque ne peut pas durer quelque temps sans amener l’abus des émissions ; des émissions surabondantes déprécient infailliblement la circulation financière ; on ne tarde pas à tomber dans tous les dangers et dans toutes les misères du papier-monnaie. Je crains surtout les tentations que pourrait donner à un mauvais gouvernement cette facilité de créer des ressources factices. Le cours forcé des billets de banque est un premier pas sur la pente révolutionnaire, au bas de laquelle on aperçoit la planche aux assignats.

Tous les esprits prévoyans s’accordent sur la nécessité de faire cesser au plus tôt une situation aussi peu régulière ; mais il ne dépend pas de la Banque de reprendre, par une mesure générale, obligatoire et irrévocable, ses paiemens en espèces ; cette résolution est dans les mains de l’état. La Banque n’a plus la disponibilité de son capital, du fonds destiné à faire face aux demandes de remboursement alors que la circulation est libre, car elle en a prêté ou s’est obligée à prêter deux fois la valeur à l’état. Il faut donc que ces 200 millions soient rentrés dans les caisses de l’établissement, avant qu’il s’ouvre en toute liberté à la circulation et à l’escompte. Il faut réduire de 150 à 200 millions la dette flottante, en abordant l’exercice prochain. Procédera-t-on par voie d’économie, par voie d’augmentation des recettes ou en recourant au crédit ? Voilà les questions qui se posent à l’ouverture de l’année 1851.


II. – BUDGET DE 1851 – DEPENSES.

Voici la combinaison à laquelle s’est arrêté, pour le budget de 1851, M. le ministre des finances. Il prend pour point de départ les réductions opérées sur les dépenses de 1850 par la commission du budget, réductions qui s’élèvent, on l’a vu, tant pour les charges ordinaires que pour les charges extraordinaires, à la somme de 84 millions. À ces retranchemens déjà considérables, il ajoute une économie de 12 millions sur le budget particulier de la guerre, ainsi que la suppression du fonds d’amortissement, qui ne se trouve plus porté que pour Inémoire dans la nomenclature des dépenses, et qui cesse de figurer pour ordre dans la nomenclature des recettes. Par le procédé que nous venons de décrire, le budget ordinaire de 1851 descend à la somme de 1,282 ; 263,249 fr. : c’est une économie apparente de 85 millions sur celui de 1850 ; mais l’économie réelle n’est que d’environ 12 millions.