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Égyptiens, en consacrant ces souterrains à la religion et aux morts. Les catacombes romaines sont l’analogue des nécropoles de Thèbes et de Mémphis, des latomies de Naples et de Syracuse, et des hypogées de Tarquinie. Une chose digne de remarque, c’est que la décoration des hypogées étrusques comprend également des images et des symboles relatifs à l’état des ames après la mort, et les emblèmes des peines et des récompenses posthumes y sont fréquemment figurés.

Aucune de ces sépultures souterraines ne renferme un si grand nombre de peintures et de sculptures, de monumens de toute espèce, que les catacombes romaines. Pendant plus de six siècles, les artistes chrétiens y ont déployé a loisir, leur savoir-faire : C’est un musée religieux des plus curieux et des plus complets. Cependant, depuis longues années, l’étude des catacombes de Rome et des monumens singuliers qu’elles renferment avait été complètement négligée. — L’entrée des cryptes était obstruée ; beaucoup de galeries étaient fermées, et l’accès en était en quelque sorte interdit à l’étranger qui se présentait pour les visiter. Enfin, sous le pontificat de Grégoire XVI, la découverte de peintures d’un certain intérêt, et particulièrement d’une image de la Vierge qui remontait au IIIe siècle de l’ère chrétienne, vint reporter l’attention des savans et des fidèles sur ces souterrains mystérieux. On en reprit l’exploration avec une nouvelle ardeur. On s’attendait à ce que d’importantes découvertes signaleraient ce mouvement, et on espérait que les résultats en seraient consignés dans quelque intéressante publication ; il n’en fut rien. Quelques peintures furent reproduites isolément dans divers recueils d’une valeur secondaire, et le père Marchi, savant jésuite, qui avait imprimé aux recherches les plus récentes et à la nouvelle étude des catacombes romaines une active impulsion, ne se servit guère des monumens découverts en dernier lieu et reproduits d’ailleurs avec soin, mais sur une très petite échelle, que comme de pièces à l’appui de l’histoire des édifices chrétiens des premiers siècles qu’il publie aujourd’hui. Le champ, comme on voit, était libre ; il appartenait à M. Perret de montrer ce qu’il pouvait produire.

Notre laborieux compatriote a consacré six années de sa vie à mener à bonne fin sa longue et difficile entreprise. Il s’était proposé de tout explorer et de tout voir, et il a voulu se tenir parole. C’étaient soixante catacombes à parcourir, dont les galeries, réunies bout à bout, présentent un parcours de plus de trois cents lieues. En sens inverse des bâtimens construits sur les terrains qui les recouvrent, ces demeures souterraines présentent plusieurs étages superposés, dont le quatrième et le plus profond s’enfonce à plus de quatre-vingts pieds sous le sol. M. Perret n’a reculé devant aucun sacrifice, aucun obstacle, aucune fatigue. Pendant cinq années de sa vie, il s’est en quelque sorte enseveli vivant dans ces immenses caveaux mortuaires, explorant dans