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trois châteaux du promontoire, Osborne, avec son architecture moderne, est sans contredit le moins remarquable.

Il y a peu d’années encore, lord Shannon possédait East-Cowes-Castle, lord Seymour le château de Norris; on assure que le splendide domaine d’Apuldurcombe est mis en vente (tar lord Yarborough. Les nobles font comme les rois, qui s’en vont, dit-on; cela a lieu au moins dans l’ile de Wight, où leurs aristocratiques demeures sont aujourd’hui la propriété de personnes qui, pour la plupart, ont fait leur fortune dans le commerce. En dépit des mœurs, des substitutions et des privilèges, la richesse territoriale, en Angleterre, finira comme ailleurs par tomber peu à peu entre les mains de l’industrie la fortune au travail, c’est justice.

J’avais fait chez M. Sawyer, au château d’East-Cowes, la connaissance de plusieurs officiers du 36e régiment, et j’avais reçu l’invitation d’aller visiter leurs barracks situées près de Newport; je m’y suis rendu et j’y ai examiné avec beaucoup d’intérêt les différens détails du service intérieur qu’on a bien voulu me faire connaître. Dans ce régiment, comme dans toute l’armée anglaise, le soin qu’on prend du bien-être des hommes est poussé jusqu’à la minutie. Cette armée se recrutant uniquement par des engagemens volontaires, il faut que l’état de soldat y soit au moins aussi comfortable que celui de paysan, et il est plus d’un bourgeois de nos villes qui envierait la situation de tel laboureur du Middlesex ou du Devonshire. Le flogging (coups de baguette) n’est malheureusement pas encore supprimé chez nos voisins; mais, grâce aux efforts persévérans de sir Charles Napier, la flagellation n’est plus en usage que pour des cas très rares. Toutefois le soldat anglais est encore soumis à des châtimens corporels d’une autre nature. Indépendamment du peloton de punition, qui est fort sévère, on l’oblige, pour certaines infractions au service, à ramasser des pierres dans un lieu donné, ou à transporter un boulet de 24 d’un point à un autre pendant un certain espace de temps. J’ai été plus frappé de la bonne qualité et de la mine appétissante des affluens du soldat que de la propreté des cuisines. Les hommes mangent dans les chambrées. Il est permis à un certain nombre de militaires par compagnie d’avoir femme et enfans au quartier, où de petits appartemens assez commodes leur sont accordés; ces soldats reçoivent, bien entendu, leur prêt franc. On m’a assuré que la présence de leurs femmes au milieu de la caserne n’avait jamais aucun inconvénient. Rien n’est plus sage ni moins bruyant que le soldat anglais; on peut bien se promener tout le jour dans les cours du quartier de Park-Hurst, par exemple, sans y entendre un cri ou un éclat de rire. L’Angleterre est le royaume du silence. Veut-on faire l’éloge de quelqu’un : t’is a very quiet gentleman, vous dira-t-on; « c’est un monsieur fort tranquille. » Comme chacun sait,