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l’offensive contre son adversaire décontenancé, et, à son tour, il voulut faire courir Quesada. À Maestu, il faillit le faire prisonnier dans une attaque de nuit. Quelques jours après, au commencement de mai, Quesada ; renonçant à tout espoir de battre Zumala, voulut du moins tenter un coup qui retentit à Madrid. Il prit le chemin du Bastan à la tête de trois mille hommes, dans l’intention de surprendre et d’enlever la junte de Navarre qui siégeait à Élisondo ; mais, lorsqu’il voulut retourner à Pampelune, après avoir échoué, dans son projet, Zumala l’attendit à Belate pour lui en fermer la route. Quesada, n’osant affronter la rencontre des carlistes, fit un long détour pour gagner Pampelune par la route du Guipuzcoa. Arrivé a Tolosa, il se fit accompagner par la colonne de Jauregui ; mais, pendant ce long trajet, Zumala eut le temps de s’établir près de Lécumberri, au port d’Aspiroz, et là, comme à Alsassua, comme à Belate, il s’interposa entre Pampelune et Quesada. Celui ci se retira encore vers Vittoria.

Comme il fallait passer cependant et rentrer à Pampelune sous peine de servir de fable à ses ennemis de Madrid et de Navarre, Quesada fit parvenir au brigadier Linarès l’ordre de sortir de Pampelune avec sa division pour venir à sa rencontre. Zumalacarregui, à qui rien ne restait inconnu, apprit l’ordre envoyé à Linares. D’Etcharri-Aranaz, où il était posté, il se porta aussitôt à Irurzun, aux environs mêmes de Pampelune. Linarès, sortant de la ville au point du jour, heurta l’avant-garde carliste, près de l’auberge de Gulina, entré Eriée et Irurzun. Le combat fut opiniâtre et meurtrier : on se battit pendant six heures sans lâcher pied ; mille hommes restèrent sur le champ de bataille. Les carlistes, n’ayant plus de munitions, se battaient encore à l’arme blanche, quand Zumalacarregui ordonna la retraite. Linarès rentra à Pampelune, où Quesada put enfin arriver sans encombre ; les carlistes n’ayant plus de poudre pour lui disputer le passage. – Ce fut la fin du commandement de Quesada. De toutes les menaces qu’il avait faites, ce général ne put en exécuter qu’une seule : ce fut la rigoureuse application de la loi martiale contre les insurgés faits prisonniers. Tous étaient invariablement fusillés. Zumalacarregui dut user des représailles, et s’il y mit plus de ménagemens que son adversaire, c’est qu’il avait à craindre qu’à défaut de prisonniers, celui-ci ne s’en prît, dans ses vengeances, aux familles mêmes des insurgés en son pouvoir, ce qui ne manqua pas d’arriver. L’histoire ne saurait flétrir avec trop de sévérité ces horribles exécutions qui ensanglantèrent et déshonorèrent la victoire dans cette guerre de Navarre où le soldat, qui avait amnistié l’ennemi au milieu du combat, fusillait froidement le prisonnier après la défaite. Ces atrocités étaient poussées si loin des deux côtés, qu’elles firent plus de victimes que les combats. Que de scènes touchantes ou sublimes dans ce drame lugubre des vengeances politiques ! Jamais, dans aucun temps,